Lyazid Abid à propos de la visite d’Alain Juppé à Alger : « Sans le soutien de la France, l’Algérie des généraux serait déjà enterrée par l’histoire »

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Lyazid Abid
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KABYLIE (Tamurt) – Au delà de ce que la presse officielle du régime algérien a rapporté, la visite du ministre français était surtout motivée par la situation sécuritaire au Sahel. En plus de l’intérêt stratégique de cette région, quatre otages français, qui travaillaient pour AREVA, société française d’extraction d’uranium, y sont retenus par AQMI depuis plus d’un an. La gestion de cette crise serait aggravée par de fortes turbulences au sein du pouvoir algérien.

D’autres sujets, comme la fin du dictateur libyen et le soutien que lui apporte Alger, la stabilité avec le voisin marocain, le manque de volonté de la part de Bouteflika et de ses généraux d’aller vers des réformes politiques substantielles, les archives de la guerre d’Algérie, furent aussi évoqués avec plus ou moins d’insistance.

La France a effectivement échoué dans ses négociations engagées avec les ravisseurs d’AQMI qui réclament environ 90 millions d’euros. Alain Juppé, très au courant des connexions du DRS avec certains chefs terroristes d’AQMI, (Al Qaïda auMaghreb Islamique) tente cette piste. Aucune piste menant à la libération des otages français ne doit être négligée : L’enjeu est capital pour la prochaine élection présidentielle en France. Pour ne rien laisser au hasard, Alain Juppé, voulait s’assurer de plus près de la fiabilité et de la bonne foi de ses interlocuteurs en Algérie.

En vérité, ces dernier temps, tous les observateurs politiques ont remarqué la vacance du pouvoir en Algérie. Dans ce pays où déjà, en temps normal, il est très difficile de savoir qui dirige réellement, la situation s’est dangereusement aggravée. Une fois à Alger, M. Juppé trouva en plus d’un président dans un état comateux, qui de toute façon même en bonne santé ne décidait de rien sans le consentement des militaires, le Général en charge de la Sécurité incapable de gérer les affaires sensibles du pays à cause d’une sévère maladie. De ce fait et de cet état des lieux, le ministre d’Etat français n’en souffla mot. Par contre, il vient de faire les frais de la ligne de conduite de la diplomatie française vis-à-vis d’Alger. Malgré la lutte des clans au sein du sérail algérien, la France reste confrontée à l’entêtement de ce dernier à vouloir faire du Sahel une zone d’influence d’Alger. Cela compromet sérieusement les chances de libération des otages français des mains d’AQMI. Mais M. Juppé devait non seulement taire ses divergences avec les Algériens mais aussi les dédouaner quant à leurs responsabilités dans l’affaire des otages comme dans celle du soutien à Kadhafi.

Cet inconfort de la diplomatie française traduit tout son désarroi devant un partenaire qui la défie mais qu’elle doit entretenir, faute de mieux. La France est contrainte à la complicité avec un régime criminel qu’elle participe de fait à rendre encore plus opaque. Aujourd’hui, personne n’ignore que sans le soutien de la France, l’Algérie des généraux serait déjà enterrée par l’histoire.

Comment peut-on encore attendre de tels partenaires la libération des Français retenus en otages dans l’immensité du Sahara, quand en Kabylie, à moins de 60 kms d’Alger, les mêmes terroristes sèment la mort chaque jour et dans l’indifférence des services de sécurité, quand ce n’est pas sous leur propre protection ?

Nous nous attendions à ce que M. Juppé mette son homologue algérien devant ses propres contradictions : N’est-ce pas l’armée algérienne qui a tiré et tué en 2001 pas moins de 127 jeunes kabyles et handicapé des milliers d’autres à vie ? Pourtant ces jeunes, ils n’étaient munis que du mot liberté dans leur bouche. Quel crédit accorder à un si violent, si brutal Etat pour rechercher une solution politique à la crise libyenne ? Le régime algérien a peur de subir le même sort que celui de Kadhafi. C’est l’une des raisons pour laquelle Alger refuse de reconnaitre la CNT libyenne. Les photos satellites montrent de façon éclatante le soutien des généraux algériens au boucher de tripoli. Les bijoutiers algériens, à l’affut de l’euro à n’importe quel prix, savent très bien où se rendre pour s’approvisionner en or à bon marché. La route vers l’or de Kadhafi est dégagée. C’est là, une façon de contourner l’embargo économique imposé par l’ONU contre le tyran libyen.

Nous exhortons vivement M. Juppé d’éviter de reproduire avec Alger la politique de son prédécesseur à Tunis : l’aide contre le peuple.

On sait quand le régime algérien est en phase avec Paris : il sait se faire discret sur les sujets qui fâchent. Quand on brandit contre la France, le devoir de repentance, l’accueil est glacial. Inutile, après, de distribuer des bons points. Il n’y en avait pas de quoi.

Les tenants du pouvoir en Algérie ne sont en aucune façon intéressés par le patrimoine mémoriel. Il met trop en relief leur vacuité, quand ce n’est pas leur trahison durant la guerre d’indépendance, devant des hommes qu’ils ont assassinés ou qu’ils ont contraints à l’exil. Ils s’agitent juste pour échapper au regard de ceux qui les voient en tant qu’usurpateurs du pouvoir en Algérie depuis 1962. A cette occasion, l’G.P.K., héritier moral des responsables de l’ex wilaya III, réitère sa demande à la France d’obtenir une copie des archives de la guerre d’Algérie.

Pour aller dans le sens du rapprochement de nos peuples du bassin méditerranéen, il serait plus judicieux que la France pèse de tout son poids pour que le régime algérien, à l’instar de son voisin marocain, officialise ses langues berbères et accepte la demande du peuple kabyle d’organiser un referendum pour l’installation d’un Etat autonome en Kabylie.
Les réformes que la France attendait en Algérie tardent à voir le jour. Là encore, le pouvoir algérien recourt à la ruse. Au lieu de chercher la concertation avec toutes les forces réelles du pays pour aller vers une représentation réelle des peuples, il cherche à provoquer la confusion et appelle par la voix de son ministre de l’intérieure, à la création d’une organisation contre le Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK) afin de torpiller les vrais débats. A cet effet, une commission installée par le pouvoir, a d’ores et déjà commencé à instaurer un système de corruption, marchander des clients pour dire oui au projet de révision de la constitution qui va enchainer un peu plus la Kabylie et la pousser vers la violence.
C’est ainsi que le pouvoir d’Alger tente de contourner les exigences de la démocratie. Il y va de l’avenir de tous les peuples d’Algérie. La mise en scène est énorme et les peuples n’oublient rien.

Dénoncer ces pratiques, d’un autre âge, grandira la France et contribuera rapidement à faire tomber la tyrannie.

Lyazid Abid
Ministre des relations internationales du (GPK)

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