Projet de loi organique relative à l’information : Conférence à Tizi-Ouzou du juriste et député, Hakim Saheb

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Hakim Saheb
Hakim Saheb

TIZI-OUZOU (Tamurt) – Dans une conférence animée ce matin au siège de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH) de Tizi-Ouzou, le député du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD qui est juriste de formation, M. Hakim Sahem, n’a pas caché ses inquiétudes sur les effets négatifs que pourrait produire le projet de loi organique relative à l’information, actuellement à l’étude au niveau de l’assemblée populaire nationale (APN), s’il venait à être voté. « Et fort probablement, cette loi sera votée », nous a déclaré en aparté le conférencier à la fin de sa communication.

L’invité de la LADDH, a décortiqué et explicité le projet de loi en question lequel est composé de pas moins de I32 articles lesquelles sont divisés en I2 chapitres. Le conférencier a considéré qu’en projetant de mettre une série d’obstacles aux journalistes quant au traitement et la diffusion de l’information, la sphère décisionnelle en Algérie privera dès lors le citoyen de son droit à l’information. Usant de ses compétences de juriste, le député du RCD a commencé alors à expliquer les portées des articles jugés comme des « freins » à la pratique journalistique et, par conséquent » à l’impossibilité au citoyen d’acquérir l’information. Dans ce même contexte, le conférencier a démontré aussi bien l’insignifiance de certains articles tant ils sont couverts d’opacité et la volonté de leur auteur de les élaborer ainsi. C’est le cas par exemple de certaines propositions contenues à l’article 89 dans le chapitre I2 que voici :

– s’interdire de porter atteinte aux attributs et aux symboles de l’Etat,
– s’interdire de porter atteinte à la souveraineté et l’unité nationales,
– s’interdire toute atteinte à l’histoire nationale,
– s’interdire de diffuser ou de publier des propos et des images amoraux ou choquants pour la sensibilité du citoyen,
– s’interdire de porter atteinte aux intérêts économiques et diplomatiques de la nation, s’interdire tout acte de nature à porter atteinte à l’honorabilité, à la réputation et à la vie privée des personnes.

Comme nous le remarquons, ces propositions ne sont pas explicites. Est-ce par exemple dénoncer les abus sexuels commis par un ministre ou un général sur des fillettes de onze ans serait considéré comme une atteinte à l’honorabilité et la réputation d’une personne ? Est-ce que dénoncer l’incompétence du ministre des affaires étrangères où la non performance d’une entreprise publique ou privée serait considéré comme une atteinte à la diplomatie ou à l’intérêt économique ? Est-ce encore parler des activités politiques et militantes du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie (MAK) serait considéré comme une menace à l’unité nationale ?

Par ailleurs, l’article proposé comme substitution à celui portant peine d’emprisonnement au journaliste fautif (en vigueur actuellement) est loin d’être meilleur. En effet certains articles prévoient des amendes de 50.000 DA à I00.000 DA à l’encontre du journaliste, auteur de délit. A notre question de savoir si dans le cas où le journaliste condamné au paiement d’une amende n’arrive à la payer, qu’adviendrait-il de lui ? Le conférencier est catégorique : « Il risque l’emprisonnement ». « Car dans ce cas, explique le député du RCD, cela relèverait du judiciaire ». En somme, même avec ce nouveau code de l’information, le risque d’emprisonnement pèse toujours sur la tête du journaliste. Donc, l’auteur de ce projet de loi, avec sa subtilité, n’a fait que renforcer les mécanismes de répression à l’encontre des professionnels de la communication.

Le conférencier est allé en profondeur dans l’étude et l’interprétation des articles composant le projet de loi relative à l’information. Enfin, le député Hakim Saheb a souligné à titre de résumé qu’il y a un grand recul en matière de démocratie en Algérie. « En tout cas, cette loi désavantagera les journalistes et autres professionnels de la communication, si elle venait à être votée », a-t-il souligné avant de prendre part à la collation offerte à ses invités par la LADDH de Tizi-Ouzou.

Said Tissegouine

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