Lyazid Abid : « Boualem Sansal est un symbole de courage et de résistance »

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Conférence de Boualem Sansal et de Lyazid Abid à Nierdergailbach a l'ocasion de Yennayer 2962
Conférence de Boualem Sansal et de Lyazid Abid à Nierdergailbach a l'ocasion de Yennayer 2962

SAARLAND (Tamurt) – Quelle belle façon de triompher de l’arbitraire ! C’est l’imparable victoire de la littérature sur la fatalité, sur l’injustice et le mépris. C’est en fin de compte, une victoire implacable sur la lâcheté. Cette lâcheté qui fait que les livres de Sansal sont interdits dans un pays où leur auteur est libre d’y vivre et de circuler.

Merci Monsieur le Maire pour cet accueil. Merci DKF pour les liens si solides que vous consolidez chaque jour un peu plus entre nos deux cultures. Je veux dire ici, entre la culture allemande et la culture kabyle authentique et non cet erzatz de culture que le pouvoir tente de nous imposer.

Cher Boualem, au nom du Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, au nom du GPK, en mon nom personnel, je te présente mes sincère félicitations pour le prestigieux prix de la Paix des libraires allemands dont tu nous fais honneur.

Cher Boualem, qui d’autre que toi pouvait comprendre nos angoisses. Comme nous, tu es sensible à l’imposture qui menace l’identité de nos peuples.

Comme Albert Camus, Kateb Yacine, Mouloud Mammeri tu es aujourd’hui pour nous un repère qui nous permet de lutter contre la résignation. Tu nous montres le chemin de la liberté et nous invites à l’emprunter. Te lire, cher Boualem, renforce notre courage contre les tyrannies les plus redoutées. Tes écrits pénètrent nos esprits et nos cœurs pour y déposer des messages d’espoirs et de paix. Des valeurs humanistes que ni la misère, ni le despotisme, ni le temps ne pourront atteindre. Tenaces, tes écrits transcendent la vanité des hommes pour fustiger cette chose méprisable : la cupidité sans bornes des puissants.

De Boumerdès où tu as élu domicile dans une demeure entourée de barbelés que n’importe quel fou pourrait franchir pour t’atteindre, tu résistes, tu vis. Et, sans répit, tu combats l’absurde. Contre la folie des hommes enivrés par le pouvoir, tu brandis ta plume. Une plume, qui ne cesse de nous émerveiller par l’exactitude de tes réflexions. Chaque jour, ton message, bien que censuré, est relayé et amplifié par sa propre vérité. Ton œuvre grandit et nous aide à mieux comprendre la lutte que tu mènes contre la fatalité. C’est vrai : aucune tyrannie ne pourra venir à bout de ta plume. A juste titre, tu disais lors de la remise du prix de la paix dont tu nous as honorés : « j’ai choisi d’écrire. Et j’ai raison de le faire, les dictateurs tombent comme des mouches ».

Quelle belle façon de triompher de l’arbitraire ! C’est l’imparable victoire de la littérature sur la fatalité, sur l’injustice et le mépris. C’est en fin de compte, une victoire sur la lâcheté du pouvoir. Cette lâcheté qui fait que les livres de Sansal sont interdits dans un pays où leur auteur est libre d’y vivre et de circuler. C’est là que réside la honteuse ruse du pouvoir algérien. Il vous combat violemment, toutefois en faisant croire qu’il vous ignore. C’est ainsi qu’il a aussi agi avec l’impressionnant mouvement citoyens de Kabylie en 2001 : il a engagé de fallacieuses négociations avec des délégués qu’il a lui-même choisi, le temps de torpiller la revendication populaire. Avec cette même méthode, le pouvoir a essayé de contrecarrer les militants autonomistes. Sur le terrain, les militaires, revenus par effraction en Kabylie après avoir été chassés en 2001, brûlent nos terres, forcent les entreprises génératrices d’emplois à se délocaliser dans d’autres régions d’Algérie, font fuir les investisseurs pour affamer le peuple et le pousser à faire allégeance au pouvoir.

Le même subterfuge est utilisé contre les Touaregs, alors que depuis 50 ans, ils ne cessent de les réduire à subsister dans des réserves contrôlées pour les exposer aux touristes. Je saisis cette occasion pour saluer nos frères touaregs du MNLA et leur témoigner la solidarité du peuple kabyle.

Faire l’inventaire de tous les malheurs que le régime algérien a occasionné à la Kabylie prendrait trop de place pour pouvoir en parler ici. Je cite encore Sansal, à propos de l’origine de ce mal : « Le lendemain de l’indépendance, le 5 juillet 1962, la liberté gagnée par le sang a été volée au peuple comme on vole l’argent des pauvres »

L’Europe, qui nous offre exil et réconfort devrait se méfier de la « Realpolitik » et des vertus du double langage. C’est l’absence de liberté qui fait de l’Algérie le pays le plus touché par le phénomène des boat-people, qu’on appelle chez nous les Harraga. L’auteur du roman du même nom, nous dit que « L’absence de liberté est une douleur qui rend fou à la longue. Elle réduit l’homme à son ombre et ses rêves à ses cauchemars »

Merci pour l’intérêt que vous portez à la Kabylie et à l’occasion du nouvel an berbère, permettez-moi au nom du Gouvernement Provisoire Kabyle et en mon nom personnel, de vous présenter une bonne année pour 2012.

Que la Paix et la liberté triomphent dans le monde !

Lyazid Abid
Fondateur de l’Association Amitié Allemagne-Kabylie

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