Interdiction d’écrire en amazigh (berbère), en Algérie : Même sur une tombe

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ALGÉRIE (Tamurt) – Suite au décès, le 30 octobre 1973, de ma très chère et bien aimée grand-mère, LDjouher LAICHOUR, j’ai demandé à un marbrier algérois, de graver, sur une plaque funéraire en forme de livre ouvert, son nom, prénom, ses dates de naissance et de décès, en deux langues : en arabe et en tifinagh, l’écriture de tamazight, la langue amazighe.

Le marbrier, stupéfait, n’ayant jamais eu une pareille demande, ni entendu les mots «tamazight, amazigh » et encore moins le mot « tifinagh », me fit part de son incompréhension et de sa totale ignorance.
Mais il accepta à la seule condition, pour le motif de son ignorance totale quant à la maîtrise de cette « autre écriture », de tout écrire moi-même au crayon sur l’une des faces de cette plaque funéraire afin qu’il puisse lui, les graver après. Quant à la partie en arabe il s’en occuperait tout seul. A la gravure, il ajoutera une dorure afin d’embellir la plaque.

Certes, cette écriture amazighe ancestrale appelée tifinagh était méconnue en Algérie, mise à part son usage courant chez nos compatriotes Amazighs du Sud, lesquels l’ont, heureusement, sauvegardée. L’Académie Berbère, association fondée en France par, entre autres, Mohand Arab BESSAOUD, Saïd HANOUZ et Marguerite-Taos AMROUCHE, nous la transmettra ensuite. Cela se justifiait, par conséquent, de la part du marbrier.

En plus de mon désir de rendre hommage, par cette plaque funéraire, à ma défunte très chère grand-mère, je voulais, aussi, exprimer symboliquement, notre ouverture culturelle et linguistique et ce, par la forme d’un livre ouvert écrit dans nos deux langues en usage en Algérie : l’amazigh et l’arabe.
N’est-ce pas l’une des preuves indéniables et irréfutables que notre revendication au droit d’écrire en amazigh ne signifiait pas le rejet de l’arabe, imposé comme langue unique par le Pouvoir dictatorial, ni encore moins porter atteinte à l’intégrité de notre Pays, entres autres accusations absurdes, abjectes, calomnieuses, fallacieuses et stupides?
Et ce, pour nous faire subir des tortures et des incarcérations pour des morts lentes, voire des morts subites. Comme l’avait si bien écrit, le grand écrivain, l’intellectuel révolté, Kateb Yacine, dans sa préface à l’ouvrage, Histoire de ma vie, de Fadhma Aït Mansour : « Trop de parâtres exclusifs ont écumé notre patrie, trop de prêtres de toutes religions, trop d’envahissements de tout acabit se sont donné pour mission de dénaturer notre peuple, en l’empoisonnant jusqu’au fond de l’âme, en tarissant ses plus belles sources, en proscrivant sa langue ou ses dialectes et en lui arrachant jusqu’à ses orphelins.»

En nous privant de notre identité naturelle, historique et légitime, c’est-à-dire notre amazighité, puis de jouir pleinement de notre patrimoine linguistique et culturel, en plus de la privation totale de notre liberté d’expression et de la démocratie, pour lesquelles plus d’un million et demi d’Amazighs de notre Pays, l’Algérie, avaient donné leurs vies. Les minables tenants de ce Pouvoir illégal, illégitime, postindépendance, manifesteront ainsi leur amazighophobie, leur déni identitaire, leur négation de nos communes racines.

Le jour où je devais aller récupérer ladite plaque, un grand problème, le problème que j’appréhendais, se posa.
L’artisan marbrier me fit savoir qu’un Haut fonctionnaire de la Présidence, venu chez lui pour récupérer une commande de plaques, ayant vu celle qu’il m’avait faite, lui avait reproché d’avoir gravé en berbère, « une langue et une écriture interdites », affirma-t-il, par l’Etat algérien. « Casse-là et jette-là à la poubelle ! » Lui recommanda-t-il en plus.
L’artisan, embarrassé, terrorisé même, ne savait pas quoi faire, ayant peur d’avoir commis un délit voire un crime – un crime de lèse-majesté ! – comme le lui fit croire le Haut fonctionnaire, représentant de l’un de ses grands clients, l’Etat, en outre. Casser cette plaque et perdre de l’argent ou bien me la laisser, ainsi faite, la prendre et se faire payer par moi ?
– « Que vais-je faire maintenant ? »

A sa question pertinente et embarrassante, tout en ayant peur moi-même, je lui répondis :

– « Ne prends pas au sérieux ce qu’il t’a dit cet ignare de fonctionnaire. Il t’a dit n’importe quoi. Il t’a menti. C’est un pauvre fou. Ne l’écoute pas. Tu n’as rien fait de mal, au contraire ».
Voulant se débarrasser illico presto de cet objet en marbre encombrant même de la taille d’un livre ordinaire, mais « dangereux parce qu’interdit », il me dit alors de prendre ma plaque funéraire, de le payer et de m’en aller vite. En outre, surchargé de travail comme il était dans son atelier, à en voir le nombre de plaques et le brouillard de poussière qui y régnait à l’intérieur, c’est à moi qu’il dit de remplir la facture après l’avoir payé. Cette opportunité me permit d’y inscrire un faux nom et une fausse adresse laissés dans le double de son carnet. Afin de me protéger de toutes probables investigations policières que pourrait provoquer ledit Haut fonctionnaire suscité.

Le cimetière où repose ma défunte grand-mère est situé à l’entrée de Taourirt Moussa-Ou-Amar, un village qui fait partie de la commune d’Aït-Mahmoud, du département de Tizi-Ouzou et de la région de la Haute Kabylie. Sa tombe est facilement visible depuis le chemin. Par cette proximité, un jour, des gendarmes, de passage, auraient remarqué ladite plaque funéraire et auraient gueulé tels des loups devant des témoins :

– « Mais qui a osé faire ça ? C’est interdit ! »

Feu ma grand-mère repose à côté de son fils unique, Miloud SALMI, le grand valeureux militant pour l’indépendance de l’Algérie, celui qui avait refusé de se marier, comme elle souhaitait, et ce pour continuer à servir son Pays jusqu’à être assassiné par les usurpateurs qui avaient pris le Pouvoir.

Voilà pourquoi et comment, comme l’avait écrit l’hebdomadaire national Algérie-Actualité dans son édition n°1120 du 2 au 8/4/1987 : « L’algérien était ankylosé puis momifié dans des textes qui lui interdisaient même jusqu’au moindre murmure. La toute-puissance étatique et l’appareil politique réfléchissaient pour lui, veillaient sur lui et géraient même jusqu’à son intimité. Pour un tour de chant, une animation de quartier, un robinet à réparer… » Et, j’ajouterais comme ainsi prouvé : … jusqu’à une plaque funéraire.

Sans doute, la première plaque funéraire gravée ainsi en amazigh en Algérie ! Et ce, malgré l’interdit. En tifinagh, notre écriture ancestrale ! Une écriture et une langue que le géant mondial Microsoft vient d’intégrer dans son logiciel Windows 8 ! Désormais l’amazigh et le tifinagh, la langue et l’écriture interdites en Algérie, font parties intégrantes du monde numérique. Bien sûr d’autres moyens et polices pour écrire en Tifinagh, sur ordinateur et via Internet existent déjà, comme le logiciel Tifino crée par Ibrahim Bidi.
Et plus encore, selon une dernière information, la langue amazighe deviendra une langue officielle en Libye (en attente de confirmation).

Que de souffrances, que de larmes, que de tortures, que d’humiliations, que de mépris, que de privations, que d’emprisonnements, que de sacrifices, que d’incompréhensions, il aurait fallu subir, en Afrique du nord en général et en Algérie en particulier, des années durant, pour qu’aujourd’hui l’on puisse librement écrire en amazigh sur un papier, sur un tableau, sur une banderole, sur un T-shirt, sur une enseigne, sur un mur, sur une tombe, sur un ordinateur et jusque sur un décret officiel !

Smail Medjeber

11 Commentaires

  1. L’auteur de cet article nous prend pour des débiles mentaux ?

    1) Wqen les marbriers en kabylie cela aurait été plus simple de faire ça en pays berbère non? pourquoi une commande à alger ?

    2) Il met un faux nom et une fausse adresse sur la facture qu’il remplit lui-même pour être oublié au cas où, mais nous décrit au paragraphe suivant l’exact emplacement de la tombe de sa Grand-Mère, nous citant même le nom du village et le nom d’un parent de la Mamie !!??? Vive l’anonymat et la discrétion.

  2. Un cancre arabiste ne peut decider pour tout une peuple. Dans le cimetiere de ma ville il ya plein de plaque tombale en Tamazight.

  3. Anwa akken i d-yenna-n, yessefk ad nettaru γef iẓekwan s tmeslayt i nefhem nekkni akk d Taεrabt i Sidi Rebbi! Mass Meğber d ameγnas aqbur izeggir-n yal tikkelt zdat wegdud, nessaram kan ad ḍefren wiyaḍ,

  4. Quelle betise !

    Une consultation aupres d’un avocat, qu’il aurait sans doute fournie gratuitement aurait suffit – Ou encore aupres d’une des cellule des dites ligues des droits de l’homme . . .

    1. Pourquoi se faire une plaque quelconque a Alger plutot qu’en Kabylie ?

    2. Ce bidule de « la presidence » n’est pas charge’ de reguler les cimetieres, certainement pas en Kabylie. Ces bidules aussi truque’s qu’ils sont ne s’interessent pas a ce genre de conneries – Surtout quand il n’y a aucun texte de loi qui gere ca – ou du moins qui interdise l’inscription en une langue nationale, ou specifiquement Tifinagh.

    3. Ton bonhomme se plait bien de ton amitie ou plutot de l’esperance de la mort de chacun de ta famille, c.a.d. ton business, mais tient plus a son mohamed. Je doute qu’il y ait le moindre singe qui soit venu le voir, etc. Peut-etre une barbouse du garage du coin fait mosquee, ou peut-etre qu’il s’est lui-meme alle s’informer aupres d’eux.

    Bref l’abus de pouvoir ou plutot de fonctions, a mon avis, n’est que l’oeuvre d’ignards qui laissent aller. Une chose est certaine – Voila une activite’ « le travail du marbre » a emporter en Kabylie.

    Il y a une eternite’-presque, on m’a demande’ de remplir un formulaire dans un consulat en takhrabt et j’ai biensur refuse’, rxpliquant au singe que je suis Kabyle et algerien et l’arabe ne m’interesse pas du tout. Ils ont tourne’ en rond, alle’s chercher leurs superieurs un par un jusqu’a l’ambassadeur… Demande’ la protection de la police en me rendant a leur ambassade, justifie’ par la peur d’un etat terroriste sans droit – et je l’ai obtenue… Bref, une annee plutard – j’ai recu mon passport !

    C’est des laches, et il n’y a qu’a les regarder droit dans les yeux, leur dire leur verite’, et ils reconnaissent vite leur nature molle, quand ils se retrouvent devantun OS DUR – Psychologiquement, ils se disent ahhhh, ce doit etre un dur Z…b comme celui de mohamed et ils se mettent a genoux.

    Ce n’est pas ce que font ces bidules qui a cre’e cette situation, c’est ce que NOUS NE FAISONS PAS.

    { {{Pauvre monsieur/madame, tu t’es aventure’ a mentir – a accepter le faux, plutot que de faire face a la durete’ de la reralite’, fabrique’e – C’est cette pre-disposition a s’accomoder du faux, dans une multitude de petites choses de la vie, entre autre l’ecole, qui a cre’e et fait perdurer notre situation.}} }

  5. C’est à ceux qui ont crié victoire le 22 AVRIL 95 de régler ce problème puisque ils l’ont hurlée. D’ailleurs aujourd’hui ils sont tous devenus commis d’état(directeurs,ministres etc). Ils ont appelé à la reprise des des cours sans avoir rien acquis et la preuve est là. Interdiction d’un nom et prénom berbère sur une plaque funèbre
    Donc aussi aujourd’hui je dirai seulement où sont ceux qui les ont suivis et soutenus mordicus? C’est à eux que revient la grande responsabilité. Qu’ils nous disent où se sont-ils caché.

    • Azul ! Mas Smail Medjber relate des faits datant des années 70 !! La situation a un peu évolué, s’agissant des tombes !! Quand à l’officialisation de tamazight, il ne faut pas rêver !! Un pouvoir arabo-islamique n’a pas vocation à se soigner, l’aliénation étant sans remède, tout ne peut s’arracher que par un rapport de forces !! Ce n’est pas cette division des Kabyles et le ressassement lassant, des rancoeurs passées qui risquent de faire peur à un pouvoir aussi sadique !!

      • @BENAI OUALI
        Ne s’agit nullement de rêve mais plutôt de volonté,de courage et de détermination. Abdellaziz RAHABI vient d’avouer que le président ZEROUAL allait prendre la décision de donner au berbère le statut de langue nationale si ce n’était la réaction moyenâgeuse du conseil de la révolution. Et donc si la pression avait continué via cette grève du cartable,Tamazight aurait déjà eu son statut de langue nationale et officielle sans perte de vies humaines en 98 et 2001 entre autres le rebelle LOUNES.
        Aussi comprenez bien que si ce statut sus-cité a été acquis,le zèle du pouvoir devant la kabylie aurait déjà disparu en donnant lieu au recouvrement de la dignité et par conséquent ce statut officiel donnerait aussi lieu à des milliers de postes budgétaires dans l’enseignement et l’art traditionnel,soit un début de la fin de la misère. Mais ceux qui voulaient devenir présidents et ceux qui les ont soutenus étaient là pour décider autrement. Et tout cela a donné champs libre à l’arabo-islamisme et à la jachère économique en kabylie avec une année d’études perdue.

  6. Les salopes qui font perdurer ce probleme, sont celles qui acceptent la continuation de faux arguments, et qui me censurent des que je releve un bout de verite’ !

    1. Il n’y a pas besoin de plaques engravees ailleurs qu’en Kabylie-meme.

    2. S’engager soi-meme dans les fausseries pour echapper aux tracassements imaginaires qui s’ils s’averaient vrais SONT ILLEGAUX.n challenge a quiconque IDIOT qui oserait aller controller les tombes, et de 2 la vulgarisation de ceci, inciterait le reste des Kabyles a le faire et eveillerait les consciences.

  7. Un Arabe musulman si tu veut le détruire surtout moralement et qu’il s’éloigne de toi sans rien dire avec une peur jamais vue , il faut leurs dire que je suis JUIF , ils pissent devant cette race incroyable mais vrais , mes voisins arabes du quartier (bâtiments) ils me cèdent le passage parce-que je porte sur moi une étoile Juif. ils me respect par peur c’est des Lâches ils m’invitent ils me disent souvent que n’est des frères et le prophète momoh son voisin est juif , moi je fait la tête je connais leurs chansonnettes .tannemert

  8. Ces dernièrs années les tombes sont marbré est titrés en arabe avec un croisson etoilé comme kassamen(l´islame est une religion officielle de l´etat) alors que par le passé ca pas été le cas, les gens jet un corp sans vie dans une tombe sans aucun souci de le décoré, terre et pièrre suffira couvrire le cadavre sous la profondeure de 2m pour qu íl puisse se décomposé sans aucune odeure qui va remonté sur la surface susceptible de nuire à la santé des vaivants.
    Ps: le Site tamurt.info mal codifié?er, le mister web doit vérifier son code html ou autre afin de voir si kelkpar ne manque une{ ()} ou un{{ .}} ou encore une {{,}} !!!!!!

  9. Il en existe chez moi en petite kabylie des tombes berbères, meme avec l’aza dessus, disons que c’est differents niveau traitement entre villages, regions etc…

    Sinon je vous conseil comme je l’ai fais moi, de faire une plaque en marbre ici en france et l’emmener la bas pour la sceller sur la tombe, éviter les plaque sur pied qui peuvent être retirées, scellez la au ciment directement sur la tombe.

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