Tichy: Vibrant hommage à Slimane Azem, pionnier de la chanson kabyle engagée

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Abdenour Abdeslam en conférence à Tichy
Abdenour Abdeslam en conférence à Tichy

TICHY (TAMURT) – « Slimane Azem est incontestablement le père de la chanson politique kabyle », a affirmé d’emblée Abdennour Abdesselam, auteur et militant de la cause amazighe, lors d’une conférence-débat qu’il a animé, ce lundi après-midi, en plein air, au stade de proximité de Tichi. « La guerre froide entre le bloc de l’Est et le bloc de l’Ouest vue par Slimane Azem » tel était le thème de cette rencontre organisée par la dynamique association culturelle Asaki pour commémorer le 38e anniversaire du décès de Dda Slimane.

« Pionnier de la chanson politique », « ciseleur du verbe », « poète et chantre hors pair », « visionnaire » sont autant de qualificatifs attribués par le conférencier à l’enfant d’Agouni Gueghrane. Après avoir brossé un portrait frappant et impressionnant de l’artiste, né le 19 septembre 1918 et décédé le 28 janvier 1983 à Moissac, en France, l’écrivain et chercheur A. Abdesselam fait une analyse thématique de la célèbre chanson « Tarwi tebbarwi », écrite en 1963. Selon le conférencier, Slimane Azem traitait dans cette chanson de la guerre froide, qui opposait le bloc de l’Est, conduit par l’ex URSS, et le bloc de l’Ouest, chapeauté alors par les Etats Unis d’Amérique. « Dans un poème désignant les deux belligérants « Russ d Marican », Slimane Azem, qui est un vrai visionnaire, décrivait un événement particulier qui se tramait durant les années 60, et ce en construisant un discours compact et suffisant sur une possible hécatombe aux conséquences apocalyptiques et de dimension mondiale ».

Abondant dans le même sens, l’orateur explique que « le gallicisme “tebbarwi”, dérivé du mot “tarwi”, inexistant alors dans le vocabulaire kabyle usuel, a été forgé directement par Slimane Azem face à la gravissime circonstance, et montre clairement que la langue kabyle est bien vivante et dynamique ». Le visionnaire kabyle a même prédit déjà au début des années 60, selon le conférencier, la montée en puissance de la Chine. « Avec habileté, Dda Slimane avait annoncé avant même le journaliste et écrivain Jean-Jacques Servan-Schreiber, qui dissertait lui aussi dans les années 70 sur le réveil chinois, l’avancée rampante mais sûre de la Chine lorsqu’il dit dans sa chanson “tura yerna-d Ccinwa” ». Par ailleurs, l’écrivain Abdennour Abdesselam a gratifié son auditoire par une analyse pertinente et profonde des chansons mythiques « Effeɣ ay ajrad tamurt iw » et « Tsaâtac (19) di Meghres ». Dans la première, Slimane Azem compare le colonialisme français aux criquets. « Cette chanson a été interdite à l’époque de diffusion dans la radio d’Alger par un arrêté de la République française », a affirmé le conférencier. « Slimane Azem était un Maquisard par sa parole », a-t-il soutenu. La deuxième chanson traite, selon l’orateur, de la confiscation de l’Indépendance de l’Algérie par l’armée des frontières, comparée à juste titre par le chanteur au Tikkuk (coucou), un oiseau dont la particularité est de ne pas construire de nid pour couver ses œufs. En effet, la femelle pond dans le nid d’un autre oiseau. Ainsi, cet oiseau évoque l’image d’un voleur et d’un usurpateur.

« Après la signature du cessez-le-feu le 19 mars, beaucoup d’opportunistes, qui n’ont tiré aucune cartouche durant la guerre, ont pris les armes pour passer comme de vrais combattants. Ce phénomène est apparu en dehors de la Kabylie. Ces faux moudjahidines vont grossir les armées de l’ALN, et en particulier celles stationnées sur les frontières marocaines et tunisiennes et dont avaient grandement besoin ceux qui allaient confisquer l’indépendance par la force militaire. En effet, Boumediène et ses partisans, usurpateurs de la dernière heure, étaient réfugiés pendant la guerre au Maroc, et sont rentrés au pays à la fin de la Révolution pour voler le pouvoir au GPRA », a-t-il expliqué.

Par ailleurs, l’invité de l’association Asaka a évoqué un éventuel projet de la Fondation internationale de la diaspora kabyle (FIDEK) consistant à acheter la maison de Slimane Azem en France et la transformer en musée. « Lyazid Abid, qui vous transmet d’ailleurs ses chaleureuses salutations, m’avait parlé de ce projet conçu par la Fondation internationale de la diaspora kabyle, a-t-il indiqué sans donner plus de détails.

Arezki Massi

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