Examen périodique universel de l’ONU : Sévère réquisitoire contre l’Algérie

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Conseil des droits de l’Homme de l’ONU
Conseil des droits de l’Homme de l’ONU

GENEVE (TAMURT) – Plusieurs pays membres du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies ont exprimé, vendredi 11 novembre, leurs vives inquiétudes quant à la détérioration de la situation des droits de l’homme en Algérie, à l’occasion du 41 examen période universel (EPU), qui se tient du 07 au 18 du mois courant. L’article controversé 87 bis incriminant l’acte politique, le recours à la détention abusive, la torture pendant la garde à vue, une liberté d’expression et des médias inexistante, l’indépendance de la justice bafouée, sont autant de violations des droits humains en Algérie dénoncées par des délégations de pays membres du CDH. Leurs recommandations au gouvernement algérien pour remédier à ces atteintes massives aux droits humains sonnent comme un sévère réquisitoire.

Les droits de l’homme en Algérie ont été passés au crible, vendredi dernier, pour la quatrième fois depuis l’instauration de l’examen périodique universel (EPU) par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Après l’intervention du ministre algérien de la Justice, dont le rapport truffé de mensonges offre une image de l’Algérie en déphasage total avec une réalité marquée par une répression féroce contre les militants politiques, notamment en Kabylie, des pays développés ont exprimé leurs inquiétudes, voire dénoncé des violations flagrantes aux droits humains, et ont formulé des recommandations au régime algérien en vue de se conformer au droit international. La porte-parole de la délégation des Etats-Unis d’Amérique a particulièrement demandé l’abrogation du controversé article 87 bis du code pénal algérien. Cet arsenal juridique a été spécialement promulgué par la junte militaire pour justifier sa répression contre les militants indépendantistes kabyles, qu’elle qualifie injustement de terroristes pour avoir exprimé le droit du peuple kabyle à l’autodétermination. « Nous recommandons que l’Algérie abroge les amendements de l’article 87 bis du code pénal qui contient une définition excessivement vaste du terrorisme, qu’elle libère les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme, détenus en vertu de cette disposition, qu’elle cesse le harcèlement et les poursuites des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme (…) », a recommandé la délégation des USA au CDH de l’ONU. La même délégation a également recommandé à l’Algérie de « mettre à jour la loi sur les associations en accord avec les droits constitutionnels et supprimer les restrictions au financement international à la coopération pour les organisations de la société civile ».

Pour sa part, la délégation australienne s’est dite « préoccupée par les indications disant que les algériens ne peuvent pas pleinement exercer leur droit à la liberté d’expression et d’association ou de réunion tels que consacrés par la constitution ». Par conséquent, elle recommande à l’Algérie d’instaurer des mesures à même de « garantir ces droits ». Elle exhorte aussi le pays examiné à « modifier les articles utilisés pour justifier l’arrestation des minorités religieuses, les journalistes et les manifestants pacifiques », ainsi que d’amender son code pénal. La Belgique, par la voie du représentant de sa délégation, a demandé à l’Algérie de « modifier les dispositions du code pénal afin de les mettre en conformité avec l’article 19 du pacte international relatif aux droits civiques et politiques ».

Le recours abusif de la justice algérienne au mandat de dépôt a été dénoncé par le Canada. Celui-ci souhaite que l’Algérie « cesse le recours à des peines privatives de liberté pour des délits de presse tel que stipulé dans l’article 54 de sa constitution, mettre fin au recours fréquent à la détention provisoire en accord avec l’article 123 du code de procédure pénale et l’article 44 de la constitution ». La délégation de l’Estonie a soulevé le problème de l’asservissement de la justice algérienne au pouvoir politique. Ce pays de l’Europe de l’Est recommande à Alger de « mettre en place un processus indépendant pour nommer les juges et les procureurs », tout en demandant l’abrogation des articles du code pénal « qui sont flous et qui permettent aux autorités de décider des sanctions pénales contre la liberté d’expression ». La délégation allemande a aussi demandé au pouvoir algérien de « réformer l’article 87 bis du code pénal », alors que celle de l’Irlande a sollicité de l’Algérie de « faciliter la visite du rapporteur spécial de l’ONU ».

Les agissements de l’Algérie fortement condamnés par Israël et le Maroc

Pour sa part, la délégation israélienne a affirmé qu’Israël « est extrêmement inquiet de la situation des droits de l’homme en Algérie ». L’Etat hébreu « condamne toute utilisation disproportionnée de la force lors de manifestations pacifiques et le harcèlement des militants et manifestants qui sont en garde à vue », a souligné la délégation hébreu. Tout en déplorant les rapports faisant état de discriminations sur la base du genre, Israël demande à l’Algérie concernant la liberté de conscience de « respecter le droit de religion des personnes appartenant aux minorités religieuses ». A noter dans ce sillage qu’une douzaine de lieux de culte chrétien ont été fermés par les autorités algériennes en Kabylie depuis 2018. Quant à la délégation marocaine, elle souligne avoir noté « avec une grande inquiétude les violations massives en Algérie », notamment dans les camps de Tindouf. Le Maroc a fait une série de recommandations au pouvoir algérien. Il l’exhorte à « autoriser d’urgence le recensement de la population séquestrée dans les camps de Tindouf », et ce, « conformément aux engagements internationaux de l’Algérie » et « à la demande incessante du Conseil de Sécurité et du secrétaire général ». Abondant dans le même sens, le représentant de la délégation marocaine demande à ce que « les responsables des atrocités commises à l’égard des séquestrés dans ces camps, qui sont torturés, portés disparus ou assassinés avec la complicité coupable du pays dit hôte » soient traduits en justice. En outre, la même délégation demande à l’Algérie de « cesser sans délai la dévolution du pouvoir accordée aux groupes séparatistes armés qu’elle abrite et qui se permettent de violer des femmes, séquestrer des hommes ainsi que l’enrôlement des enfants au sein de ses milices, ce qui constitue un crime de guerre ». Le porte-parole de la délégation du Maroc au CDH a aussi dénoncé « la répression abusive contre les manifestants pacifiques du hirak, de même que les innombrables cas de détentions arbitraires, d’exécutions extra-judiciaires et de disparitions forcées sur le sol algérien y compris à Tindouf ». Grâce au travail laborieux d’ONG internationales de défense des droits de l’homme, dont des associations kabyles, à la mobilisation sans relâche de la diaspora kabyle en Europe et en Amérique du Nord, qui a sensibilisé l’opinion internationale sur les dérives du régime algérien, mais aussi grâce à la résistance interne de braves militants kabyles, le vrai visage de l’Etat autoritaire et dictatorial algérien a été démasqué à l’ONU.

Lyes B.

2 Commentaires

  1. Tout de même curieux qu’Israel se préoccupe de la «repression» des manifestations pacifiques, alors que ses soldats tire à balles réelles sur des femmes et des enfants en Palestine, alors qu’ils manifestent pacifiquement.

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