Attentat de Cherchell : mémoire et tactique

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La promptitude avec laquelle notre gouvernement a, opportunément, proclamé sa “consternation” devant “le lâche attentat” d’Abuja contraste avec la nonchalance qui le caractérise quand il s’agit de réagir aux dégâts que nous inflige le terrorisme local. Ce fut au Haut-Commandement de l’ANP de rendre hommage à la mémoire des martyrs de l’attentat et de réitérer “sa détermination à mettre hors d’état de nuire ces bandes criminelles et assurer la paix et la quiétude dans l’ensemble du pays”. Tout au long de la matinée, et en guise de suites médiatiques à l’horrible attentant, l’agence officielle s’était consacrée à la répercussion des révisions à la baisse du bilan macabre reconstitué par la presse auprès de sources médicales. C’est à croire que, lorsqu’il s’agit de formuler ou de rappeler la position officielle face à la poursuite de l’offensive terroriste islamiste, l’État reste sans voix.

Troublante attitude d’un pouvoir politique qui s’est toujours montré compatissant avec les victimes du terrorisme international, mais apparaît comme ligoté par on ne sait quelle entrave quand il s’agit d’exprimer son sentiment devant les crimes du terrorisme qui sévit contre le pays ! Mais pour regrettable qu’elle soit, cette impuissance politique est la nécessaire conséquence de l’empressement réconciliateur autour d’un islamisme par nature belliqueux. Les responsables se seraient bousculés, s’il s’était agi de monter chanter la “réconciliation nationale” ; ils sont frappés de mutisme collectif quand il faut enregistrer l’affront et relever le défi. Pourquoi l’islamisme renoncerait-il alors à transformer sa victoire politique en prise de pouvoir effectif ?

Car, enfin, c’est la politique de l’État qui, en voulant “réconcilier” les terroristes comme simples protagonistes d’une brouille de société, en a fait une catégorie légitime pour être partie prenante du contrat social. La conséquence en est qu’aujourd’hui, dès qu’un tueur veut reprendre sa place dans “la république”, son statut de terroriste n’a plus le caractère infamant d’avant l’ère de la “réconciliation nationale”. Il est même créateur de droits que les paisibles citoyens n’ont pas. Il ne faut pas s’étonner que cet état de chose suscite des vocations.

On a voulu faire oublier les crimes du terrorisme pour les besoins d’un compromis tactique, voici le pouvoir contraint de s’aveugler devant la réalité d’une guerre qui lui rappelle que le compromis est unilatéral et que, de ce fait, il n’a pas eu lieu.

À force de maltraiter la mémoire, la mémoire nous joue des tours. L’attentat contre l’Académie de Cherchell est, à ce sujet, significatif. Il rappelle les procédés par lesquels le pouvoir, usant de tactique, maintient le pays dans d’aventureuses confusions historiques et politiques : il a visé le mess d’une prestigieuse institution de défense nationale qui renferme, aussi, une bibliothèque récemment baptisée au nom de Mohammedi-Saïd, certes officier de l’ALN, mais membre fondateur du… FIS.

M. H.

musthammouche@yahoo.fr

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