Boualem Sansal : « Ce pouvoir n’est pas un État, c’est une machine à broyer. »

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2025
Boualem Sansal
Boualem Sansal

ALGER (TAMURT) – En quelques mots seulement, l’écrivain algérien, Boualem Sansal, dans une lettre qu’il a réussi à envoyer de la prison discrètement à ses proches, a dressé le portrait du régime algérien.  » Ce pouvoir n’est pas un État, c’est une machine à broyer », écrit Sansal. Une phrase lourde de sens qui résume à elle seule la vraie nature du régime algérien. Courageux et intelligent, Sansal, au préalable de sa missive émouvante, a préféré parler de l’importance de continuer le combat et de ne pas avoir peur du régime algérien. Du fin fond de sa cellule, Sansal soutient et donne du courage au peuple algérien, alors que c’est lui qui en a plus besoin.

 « Je ne suis ni le premier ni le dernier à subir l’arbitraire du régime algérien. Ici, la prison n’est pas un lieu exceptionnel réservé aux criminels, mais un outil banal de gouvernance. La dictature enferme comme on respire : sans effort, sans honte. On enferme les journalistes, les militants, les écrivains… et parfois même ceux qui n’ont rien dit, juste pour servir d’exemple », écrit Boualem Sansal, une façon pour lui de rappeler que le peuple algérien est appelé à faire encore des sacrifices. Sansal parle du combat, du peuple algérien avant de parler de lui qui souffre derrière les barreaux depuis plus de dix mois.

« Ma faute ? Avoir persisté à croire que les mots pouvaient sauver ce pays de ses propres démons. Avoir écrit que l’Algérie ne se résume pas à un drapeau et un hymne, mais qu’elle est d’abord un peuple qui mérite dignité et justice. Avoir refusé que l’histoire se répète, que la corruption et la violence continuent de tenir le haut du pavé.

Je souffre, oui. Mon corps me trahit, la maladie grignote mes forces, et le régime espère que je partirai en silence. Mais qu’ils se trompent ! Ma voix, même enchaînée, ne leur appartient pas. Si elle peut encore atteindre l’extérieur, c’est pour dire ceci : ne croyez pas à leur façade de respectabilité. Ce pouvoir n’est pas un État, c’est une machine à broyer ». Par la suite, Sansal a adressé un message à sa seconde patrie, la France. « À la France, je m’adresse sans détour. Vous avez été ma deuxième patrie, mon refuge intellectuel. Vous qui vous proclamez patrie des droits de l’homme, souvenez-vous que ces droits ne s’arrêtent pas aux rives de la Méditerranée. Les gouvernements passent, les diplomaties calculent, mais les principes, eux, doivent tenir bon. Ne baissez pas les bras, ne sacrifiez pas vos valeurs sur l’autel des intérêts économiques ou des alliances de circonstance. Je ne demande pas ma liberté par charité, mais au nom de ce qui fonde toute société humaine : la justice. Si vous cédez aujourd’hui devant un régime qui se croit intouchable, demain, d’autres prisons se rempliront, d’autres voix s’éteindront », écrit Sansal, ce qui laisse comprendre qu’il est complètement coupé du monde extérieur. D’ailleurs, les autorités françaises, à commencer par Emmanuel Macron, n’ont ménagé aucun effort pour demander sa liberté, allant jusqu’à provoquer une crise diplomatique sans précédent avec l’Algérie.

Pour ses freres algériennes, Boualem Sansal, leur rappelle la nécessité de continuer le combat pour l’édification d’un État démocratique. « Aux Algériens, mes frères et sœurs, je dis : tenez bon. La peur est une prison plus vaste que celle où je me trouve, et elle est plus difficile à briser. Mais je sais qu’un jour, le mur tombera. Les dictateurs finissent toujours par tomber.

Quant à moi, je continuerai à écrire, même si mes pages restent cachées sous ce matelas de prison. Car l’écriture, c’est la seule liberté qu’ils ne peuvent pas confisquer, et c’est par elle que nous survivrons. » Une lettre écrite par les mains d’un homme courageux et un intellectuel souvent mal compris par les Algériens, comme d’habitude. Boualem Sansal donne une leçon de courage et de patriotisme aux décideurs algériens.

Idir Yatafen

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