Lyazid Abid, président de l’URK : « les Kabyles sont progressivement devenus les nouveaux Juifs d’Algérie »

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Lyazid Abid, président de l'URK
Lyazid Abid, président de l'URK

KABYLIE (Tamurt) – En ce moment de crise extrême entre Paris et Alger, le président de l’union pour la République Kabyle, Lyazid Abid n’est pas allé avec le dos de la cuillère pour descendre en flamme le régime algérien, qui refuse les sujets qui fâchent et la mollesse de la France dans l’affaire Sansal. Il estime que « La France doit se montrer inflexible ». Il déplore le refus de la France officielle aux responsables politiques des Mouvements indépendantistes kabyles, en l’occurrence l’URK et le MAK, d’accéder aux médias lourds français pour parler du droit du peuple kabyle à l’autodétermination. Il dénonce également haut et fort l’interdiction de voyager en Kabylie pour des milliers de Kabyles en exil. Ci-après l’interview dans son intégralité.

Une crise diplomatique inédite a éclaté entre Paris et Alger. Pensez-vous que le régime algérien finira par céder, surtout dans l’affaire de Boualem Sansal ?

Fort heureusement, les mutations géopolitiques actuelles décèlent les nids de vipères un peu partout dans le monde et à différents niveaux. Un de ces nids est l’entretien par la France officielle d’un « malaise fécond » avec l’Algérie. Des années durant, la France était comme aveugle. Elle refusait obstinément de reconnaître l’animosité que l’Algérie cultivait envers elle. Nourrissait-elle l’espoir de voir l’Algérie se rapprocher de l’Occident ? C’est une illusion.


En effet, et finalement, ni la proximité géographique ni le nombre grandissant d’Algériens vivant sur son territoire ne supputent un tel espoir. Au contraire, les millions d’islamistes vivant en France ne cessent d’exploiter les failles de la démocratie pour s’attaquer à la République. L’affaire Sansal n’est que la face visible d’un gigantesque iceberg. J’ai eu à répondre à cette question lors d’une précédente interview. Ma réponse n’a pas changé, depuis. Les Algériens, au contraire, radicalisent leurs propos, alors que la France hésite à franchir la barrière des menaces. Cette mollesse, je le répète, ne suffira pas pour libérer l’écrivain Boualem Sansal. Cette attitude de la France fait sourire de l’autre côté de la Méditerranée.

Selon vous, comment la France doit-elle se montrer inflexible à l’égard du régime algérien ?

Le grand Sansal vient de montrer le chemin. La France doit se montrer inflexible en ne reculant pas devant les sujets qui fâchent quitte à ce qu’ils emportent l’Algérie. Oui, il faut l’affirmer haut et fort l’Algérie n’existait pas avant la colonisation française. Ses frontières sont tracées par la France coloniale. Le monde et la Kabylie ont le droit de connaître l’état des lieux de l’Afrique du Nord avant la colonisation. Nous avons besoin de consulter les archives et d’accéder à la cartographie des frontières de la Kabylie, du pays des Touaregs, de celui du Mzab, des Chaouis, du Maroc et des autres pays voisins.


De quoi la France a-t-elle peur ? Que l’Algérie profane la tombe de Ferhat Abbas ?
Quelle le condamne à titre posthume pour être l’instigateur de l’extrême droite française ?
Les militants de l’URK et tous les autres indépendantistes kabyles questionnent la France sur la colonisation, un sujet périphérique pour l’Algérie, mais central pour la Kabylie.


Nous demandons à la France de ne pas remettre les archives de la Kabylie à l’Algérie. Cette dernière falsifie l’histoire pour se fabriquer une existence historique, mais en vain. La Kabylie est digne de recevoir ses propres archives, car elle est l’héritière légitime des sacrifices consentis par nos parents pour la liberté.

Certains influenceurs algériens arrêtés en France ont déjà menacé de mort à maintes reprises les indépendantistes Kabyles. Pourquoi vous ne déposez pas de plaintes contre eux puisqu’ils sont dans le viseur de la justice française ?

Ces influenceurs sont le prolongement du pouvoir algérien sur le territoire français. Ces personnes n’apprécient ni les Français, ni la culture occidentale, ni la démocratie. Ils profitent de la République et répandent une image négative de la France et de l’Occident. En plus qu’ils ne respectent nullement les valeurs de la République, ils aspirent à spolier la France. D’ailleurs, leur président Tebboune a bien décrit cet état d’esprit en déclarant que « la France doit des visas à tous les Algériens pendant 130 ans ». Si ces Algériens pouvaient déstabiliser la France, ils n’hésiteraient pas une seconde. Les Kabyles, quant à eux, profitent positivement de la France. Ils apprécient la liberté et la laïcité, respectent les lois de la République et rêvent d’une Kabylie indépendante aussi démocratique que la France. Cette ouverture sur le monde les a prémunis des cercles d’influence des consulats et autres lobbies algériens.

En relatant ces vérités, vérifiables sur le terrain, on est taxé de sionistes et de pro français. On peut aisément mesurer le ressentiment de ces Algériens envers les Kabyles. Pour eux, les Kabyles sont progressivement devenus les nouveaux Juifs d’Algérie.
Ces influenceurs sont le fruit de l’abrutissante pédagogie algérienne que l’occident tarde à combattre. En France, ils sont bien entendu tous sous contrôle judiciaire. Vous me tendez la perche pour appeler tous les indépendantistes kabyles condamnés par l’Algérie à me rejoindre pour nous constituer partie civile. Nous devons agir du côté de ceux qui portent des valeurs similaires aux nôtres. De ceux qui sont susceptibles de nous aider à nous libérer de la colonisation algérienne. La peur est éphémère. Jamais les ténèbres n’ont vaincu la lumière ! Jamais la tyrannie ne l’a emporté contre la liberté !

Tebboune et les militaires Algériens sont en position de faiblesse sur le plan international. Comment la Kabylie pourra profiter de la vulnérabilité des décideurs de ce régime ?

La France vient d’admettre ce que la Kabylie a compris depuis 1962. Les déboires de la Kabylie avec l’Algérie ont commencé quelques années avant l’indépendance de l’Algérie avec l’assassinat de tous les dirigeants kabyles qui avaient grandement contribué à l’indépendance de l’Algérie. À titre de rappel, avant l’indépendance, les services algériens, le MALG, avait plus de fiches de renseignement sur les activités des leaders kabyles que sur les déplacements de l’armée française. À l’indépendance, la Kabylie qui souhaitait un pluralisme politique et la démocratie pour honorer tous ceux qui sont tombés au champ d’honneur s’est vu envahir et elle a été meurtrie par l’armée de Boumediene sous le règne de Ben Bella. Depuis, chaque décennie, la Kabylie réitère ses revendications. À chaque fois, elle en sort meurtrie et stigmatisée. À chacune de ses tragédies, nos jeunes, nos mères, nos grand-mères furent des lanceurs d’alerte adressées au monde libre, à leur tête la France. Ils n’ont reçu de réponse que l’écho de leur douloureux cri.

Envers la France, l’Algérie cultive le sentiment de culpabilité pour pérenniser le profil. Sinon par quelle logique patriotique peut-on refuser la visite de l’Algérie à ceux qui languissaient d’envie de se rendre en Algérie. Hier, c’était Slimane Azem, Bessaoud Mohand Arab, Mohia du côté kabyle, d’Enrico Macias du côté français. Même Boudiaf et Hocine Ait Ahmed, deux chefs historiques, n’ont pu frôler la terre qu’ils avaient pourtant libéré que pour sauver le régime de l’hydre islamiste.

Aujourd’hui, ceux qui ne peuvent plus mettre les pieds sur cette terre ne se comptent plus sur les doigts d’une main. En effet, nous sommes actuellement des milliers d’indépendantistes kabyles et demain des millions à être condamnés pour nos opinions politiques et interdits de voyager en Kabylie. En Algérie, les Kabyles sont chassés de toutes les institutions étatiques algériennes. Le plan « zéro Kabyle » est passé sous silence en Europe.
La France et le monde entier ne disent rien, alors que cette chasse aux Kabyles est très inquiétante. Plus grave, la France refuse l’accès aux médias lourds à l’URK et au MAK, alors que le peuple français a le droit d’être informé de la revendication légitime du peuple kabyle qui cherche à en découdre avec l’Algérie pour son droit à l’autodétermination.


Pour répondre à votre question, la diaspora kabyle doit impérativement continuer à se mobiliser pour faire entendre au monde entier le droit du peuple kabyle à l’autodétermination. Les mouvements indépendantistes kabyles doivent aussi rester attentifs aux nouveaux enjeux géopolitiques qui surgissent dans le monde, notamment après ce qui s’est passé au Moyen-Orient avec la guerre entre Israël et le Hamas, aux Etats-Unis d’Amérique avec l’élection de Donald Trump et au Sahel. L’offensive diplomatique kabyle doit se poursuivre pour imposer la question kabyle au niveau des organismes onusiens, notamment à la Quatrième Commission de l’ONU qui se consacre aux questions relatives à la décolonisation.


La Kabylie n’exagère en rien. Elle souffre dans l’indifférence totale. Mais elle guette, impatiemment, la brèche salvatrice. Elle observe avec admiration le chamboulement de l’ordre mondial boosté par le courageux duo Trump-Elon Musk et par Vladimir Poutine sur le continent africain. Elle espère, elle en est capable, se libérer le plus tôt possible de la dernière nuit coloniale.

Lyazid Abid, président de l’Union pour la République Kabyle (URK)

2 Commentaires

  1. Le problème des kabyles c’est les kabyles eux même depuis fort longtemps.
    Le régime est fort c’est grâce à la compromission de certains kabyles pour des intérêts purement mercantiles.
    Les algériens essentiellement arabophones sont apolitiques car ils sont dans une logique de soumission, une mentalité due à leur éducation accès sur la religion islamique.
    On leur apprend à obéir sans se poser des questions et surtout ne jamais remettre en question l’autorité donc on peut rien faire avec ces gens que nous devrions respecter par ailleurs.leurs combats se limitent à la religion et à la langue arabe qu’ils considèrent sacré car selon eux c’est la langue de dieu.
    La politique et les luttes politiques se font en kabylie essentiellement par des kabyles .
    En soit c’est une bonne chose pour la démocratie mais malheureusement , parfois certains s’allient avec le pouvoir, sensé être notre ennemi commun pour juste accéder à des des avantages et ignorer l’intérêt général.

  2. Les Kabyles, le jour où ils seront conscient et réaliste concernant leurs situations et leurs devenirs là on commencera à se projeter collectivement vers un avenir commun entre citoyens Kabyles ( pas sujets dans l’actuel anegerie ) dans un futur état kabyle.
    Il suffit juste d’arrêter de fantasmer
    Sortir de l’endoctrinement algé rien !
    Et accepter d’être uniquement KABYLE ainsi grandir comme tel à l’image de tous les peuples qui ce revendique a travers la planète.
    Basta les folklores et autres danses pour amuser la galerie a chaque anniversaire de ce pseudo pays , qui nous utilisent comme les indiens d’Amérique !! .
    Soyons juste nous même. Sinon c’est l’Extinction que le gouvernement terroriste d’Alger souhaite réaliser dans un futur proche ?!
    Être ou ne pas être c’est plus une question pour les Kabyles, C est une urgence…
    AT DWAYA en force pour l’indépendance KABYLIE Kabyle et dz ne nous concerne plus .

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