Lyazid Abid à Marseille :  » l’Algérie réserve aux Kabyles le même sort que celui des Juifs et des pieds-noirs »

MARSEILLE (TAMURT) – « La Kabylie et le nouvel ordre mondial » était le thème que l’invité de l’Association Solidarité France-Kabylie, le Porte-parole de l’Union pour la République Kabyle, Lyazid Abid, avait développé dans le 13ème arrondissement de la ville de Marseille, ce week-end. Un sujet interessant qui a attiré un bon nombre de Kabyles installés à la cité phocéenne.

« La dernière fois que vous m’aviez invité, ici à Marseille, c’était pour échanger sur le Hirak. Devant l’héphémérité d’une telle démarche, nous étions pessimistes pas par défaitisme, mais par réalisme politique », précise Lyazid Abid, connu aussi pour son franc-parler et son pragmatisme dans le domaine politique.
« Effectivement, pour le Hirak, nous avions raison, mais nous n’avions pas pensé que le dégagisme produirait l’effet inverse : c’est l’Etat algérien qui est en train de dégager le peuple », une phrase qui résume vraiment les deux ans du Hirak algérien. Lyazid Abid a profité de cette tribune à Marseille pour évoquer d’emblée le drame qui a coûté la vie en mer aux jeunes de la localité d’Ath Wacif. « Le naufrage de plusieurs jeunes kabyles, originaires d’At Ouacif, dans le département de Tizi Wezzu, qui vient de se produire près de la côte oranaise, à l’Ouest d’Algérie, que nous déplorons, en est une preuve s’il en faut. La répression sanglante exercée par l’Algérie coloniale en Kabylie, les incendies criminels, les emprisonnements et les jugements expéditifs nous interpellent tous. De cette tribune, nous exprimons notre solidarité avec tous les prisonniers kabyles séquestrés par la justice coloniale algérienne ».

En rentrant dans le vif du sujet, le Porte-parole de l’URK n’a pas hésité à faire le parallèle entre le sort réservé par l’Algérie aux juifs et aux pieds noirs avec celui que ce même pays traite les Kabyles.
 » j’ai l’impression que l’Algérie nous réserve le même destin que celui des pieds-noirs et des Juifs ». L’orateur s’est demandé « qui aurait cru que l’Algérie finira par brûler vif nos villageois, incendier nos villages avant de nous accuser de terroristes et de jeter même nos femmes en prison. Le pire, c’est que l’Algérie menace d’intensifier sa repression encore plus. Devant cette tyrannie, quelle loi, quelle logique peut nous empêcher de participer activement à l’émergence d’un Etat kabyle ? » En précisant surtout que « le contexte international nous est aussi favorable ». Lyazid Abid insiste sur le sort de la Kabylie en cette conjoncture mondiale particulière pour « s’interdire de rater cette occasion qui pointe du nez. Historiquement, lors des deux grands changements, qui ont redessiné les frontières de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique, à la fin des deux guerres mondiales 1919 et 1945 sous la houlette de la Société des Nations (SDN) puis de l’ONU, nous étions sous domination française. En tant que Kabyles, nous avions préféré le parapluie algérien pour exercer et profiter du principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Cette fois-ci, il s’agit d’élégir le champ d’application du principe de la décolonisation et de libération de la Kabylie ».

Pour ce qui est de l’actualité internationale, bien évidemment la guerre en Ukraine et l’invasion de cette dernière par la Russie ont été abordé par le conférencier. Pour Lyazid Abid « L’ONU n’a plus sa raison d’être. Un des membres de son conseil de sécurité doté du droit de veto est considéré comme un paria. Poutine est même recherché par la communauté internationale. Assad est aussi considéré comme un Paria, mais l’Algérie par exemple marchande avec lui. Par conséquent et vu la manière dont des Etats peuvent instrumentaliser le droit des peuples à l’autodétermination : Poutine a imposé par la force l’indépendance des Républiques de Donetsk et de Lougansk, ce principe doit urgemment être amélioré ». Le conférencier voit que « le monde tel que connu jusqu’à aujourd’hui est en train de se désagréger. Des lois miroir fusent de chaque bloc. Aucun outil de gouvernance mondial ne fonctionne, alors que les problèmes sont de plus en plus mondialisés ».

En rappelant que « la Kabylie qui a décidé ouvertement, depuis 2010, de s’élever au rang de pays à décoloniser est sérieusement confrontée à son destin ». Lyazid Abid préconise alors aux Kabyles de s’impliquer pour bien préparer leur avenir « Nous devons dépasser les obstacles et les complexes qui nous empêchent d’exister comme peuple libre et digne. Par le passé, notre peuple a produit des actions exceptionnelles, non comptabilisées sur le plan politique à cause de notre timidité à s’affirmer en tant que peuple. L’adversaire a exploité nos hésitations pour nous enfoncer.

Le réveil géopolitique de la Kabylie est aujourd’hui une réalité ». Lyazid Abid qui lutte, depuis longtemps, sans relâche pour l’intérêt de la Kabylie rappellera en conclusion : « il nous reste à dépasser nos égaux pour faire place aux idéaux et consentir à des compromis sans nuire aux intérêts suprêmes de la Kabylie. Il nous faut convaincre sans dénigrer ceux qui pensent conquérir nos droits à travers l’Etat algérien. Ce débat, cette confrontation d’idées et d’orientations entre Kabyles renforcera nos rangs et apportera des éléments nouveaux dans le débat nécessaire à l’élaboration d’un nouvel ordre mondial plus équilibré.

Sur le plan régional et international, la Kabylie à déjà un capital considérable d’intérêt et de sympathie qui autorise son accession à l’indépendance. Il existe des pays qui verront avec satisfaction, l’émergence d’une République Kabylie sur la scène internationale. Il est évident que l’Algérie redoute la Kabylie. Le seul statut qu’elle nous reconnaît et celui de terroriste. Devant cette injustice, l’indépendance de la Kabylie est un choix courageux, cohérent est salutaire. Restons vigilant, convaincant et résolument pacifiste ».

Idir Yatafen