Lettre ouverte à la Chancelière allemande Angela Merkel: L’avenir de l’Europe, l’émigration nord-africaine et l’international islamiste.

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Angela Merkel
Angela Merkel

Excellence Mme La Chancelière Angela Merkel,

L’Union Européenne, soixante ans après sa naissance à Rome, ambitionne de réhabiliter la dimension politique comme fondement, en remodelant les accords du traité de Lisbonne, avec une politique de défense commune s’efforçant ainsi de se libérer du poids des américains, pour garantir la sécurité de 500 millions d’européennes et d’européens par eux-mêmes.

Le nouveau président américain, Donald Trump, qui a salué le Brexit et qui a attaqué votre personne avant même de prendre le pouvoir, a au moins le mérite d’être franc avec les  dirigeants européens, en brandissant sa menace du protectionnisme comme une arme commerciale contre l’Europe et son avenir.

Le succès inattendu du Brexit, est-il dû en grande partie à la montée de l’islamisme politique violent et à votre politique d’accueil des réfugiés ? Ce qu’ignorent les européens, selon Alexandre del Valle (1), c’est que les Etats Unis constituent les principaux instigateurs de l’internationale islamiste, dont l’objectif fondamental est de maintenir sournoisement une guerre commerciale contre l’Europe depuis longtemps, et c’est pour cela qu’ils n’ont pas hésité à vous espionner, du fait que l’Allemagne constitue le moteur économique de celle-ci.

L’avenir immédiat de l’Europe est inéluctablement lié à la réponse que vous porterez à la délicate question de l’émigration en général et plus particulièrement à l’émigration nord-africaine, et à l’islamisme politique qui s’est propagé au sein de celle-ci. La montée de l’extrême droite est fort préoccupante dans les différents pays européens, dont la République Fédérale d’Allemagne, comme en atteste les résultats successifs des dernières élections régionales, dans les Länders de Bade-Wurtemberg, de Rhénanie-Palatinat et de Saxe-Anhalt le 13 mars 2016, de länder de Mecklembourg-Poméranie-Occiden tale le 4 septembre et à Berlin le 18 septembre passé…Votre courageuse politique migratoire et votre volonté humanitaire d’accueillir des réfugiés, saluée largement de par le monde, au lieu d’amener plus de stabilité, aura permis, au contraire, de propager la peur aux vingt-sept états de l’UE.

Ces derniers ne savent quoi faire ni comment apporter des solutions adéquates à la crise économique ni au chômage des jeunes, ni aux flux ininterrompus de réfugiés et des émigrés, ni encore moins au problème épineux du terrorisme rampant. Les terroristes n’ont pas hésité de frapper en plein cœur de l’Europe, comme les attentats meurtriers de Paris du 13 novembre 2015 et de Bruxelles du 22 mars 2016 et la ville de Berlin du 19 décembre 2016. Après Londres, personne ne sait quelle est la prochaine cible…

L’opinion publique européenne a la sensation que l’UE, soixante ans après le traité de Rome, est devenue impuissante à stopper le recrutement de certains jeunes citoyens européens qui font allégeance à Daech, qui intègrent  ses cellules ou en agissent comme des loups solitaires, provoquant de plus en plus d’attentas barbares et choquants non seulement en Syrie, en Iraq, en Libye… Tant que l’Union Européenne ne propose pas de solutions efficaces, les forces populistes gagneront incessamment plus de terrain, et peuvent arriver à en finir avec le rêve des pères fondateurs, et par conséquent, vous entrainer inéluctablement vers un avenir incertain et sombre, marqué par la menace des guerres de religions, des nations et des régionalismes.

Mme La Chancelière,

Pourquoi des jeunes d’origine nord-africaine tombent dans les réseaux terroristes islamistes et commettent ces attentats portant atteinte et préjudice à leurs familles, à l’image de leur religion et à la stabilité de leurs communautés dans les différents pays nord-méditerranéens, qui les ont bien accueillis, qui leur ont octroyé la nationalité et qui leur ont permis de jouir des mêmes droits individuels et d’un certain bien être social ?

Comment remédier à cette situation ? Il faut comprendre pourquoi des jeunes, dont les valeurs ancestrales condamnent toute type de violence, arrivent à tomber dans les filets des réseaux terroristes, et commettent des actes sanglants, sachant bien qu’ils portent de graves préjudices à leurs familles, au message de paix de leur religion musulmane et à la stabilité et convivialité de leurs communautés dans vos différents pays.

L’extrême droite ne ménage aucune opportunité pour attribuer directement ces maux à la religion islamique, alors qu’en réalité, cette problématique revient en grande partie à un autre phénomène.L’historien français, Pierre Vermeren ne cesse de nous rappeler que la majorité des auteurs des attentats de Madrid de 11 mars 2004, ceux de Paris et de Bruxelles sont d’origine marocaine, et plus précisément sont originaires de la région du Rif (2). Mais ce qui est encore plus dangereux, c’est le fait qu’au cas où les quelques jeunes rifains, déjà à la tête du trafic du cannabis du Maroc vers l’Europe, tombent en masse aux mains de l’Etat islamique ou d’Al Qaida, ils arriveront, sans aucun doute, à déstabiliser tout le Maroc et toute l’Europe (3).

Effectivement, si vos services de sécurité essayent de procéder à enquêter en profondeur sur l’origine de ces plus de 800 jeunes allemands que Daech a réussi à recruter, ils réaliseront qu’il s’agissait plutôt de jeunes d’origine marocaine, alors qu’ils devraient normalement être d’origine turc, du fait que la communauté musulmane la plus importante en Allemagne est évidemment turc. Plus nombreuse que celle d’origine marocaine. Disons-le clairement : les raisons de ce recrutement ne sont pas vraiment liées à la religion, mais plutôt et prioritairement à la question de « la crise d’identité » (4). Si le fait religieux y contribue dans une certaine mesure, c’est parce qu’on a permis aux imams wahhabites du Proche Orient de gérer des mosquées fréquentées majoritairement par des musulmans malékites d’Afrique du Nord, comme c’est le cas de la grande mosquée de Bruxelles, sachant que la grande majorité des musulmans européens d’origine nord-africaine sont de doctrine malékite, une doctrine qui respecte la vie humaine, et qui a été diffusée par la dynastie amazighe des almoravides.

Si la majorité des jeunes issus de l’émigration tombe dans la délinquance, – dont une infime partie a été séduite par ces thèses du djihadisme-, c’est que « l’école allemande » du pays d’accueil n’a pas réussi leur intégration scolaire. C’est qu’ont observé vos responsables éducatifs dans les années soixante et soixante dix, et qui ont eu le mérite de développer et d’appliquer le programme éducatif basé sur l’ELCO, à savoir « l’enseignement des langues et cultures d’origines » (5). Ce qui a poussé votre ministère de l’éducation nationale à l’époque de passer des accords avec les pays émetteurs de l’émigration, pour dispenser de manière complémentaire des cours de langues espagnole, portugaise, italienne, polonaise, turque et arabe… Les résultats étaient spectaculaires : les écoliers d’origine espagnole, portugaise, italienne, … y inclus ceux qui sont musulmans et d’origine turc, ont tous amélioré leur rendement, l’échec scolaire s’est réduit notablement, et par conséquent, ils ont bien réussis leur intégration sociale et socioprofessionnelle; cela n’a pas été le cas des élèves d’origine marocaine, dont les résultats sont devenus pire qu’avant.

La réponse se trouvait dans le simple fait que ces enfants d’origine marocaine n’étaient pas des « Arabes », ils n’étaient pas de culture arabe ni connaissaient la langue arabe. Ils ne comprenaient rien aux enseignants marocains parce que ces enfants étaient (et le sont toujours) presque tous des Amazighs, des berbères originaires des montagnes du Rif. Si les élèves turcs comprenaient parfaitement les enseignants envoyés par le gouvernement d’Ankara, les élèves d’origine marocains ne comprenaient pas du tout les enseignants arabophones. Ces derniers ont permis d’accentuer leur « crise d’identité », de les sous-valoriser et de les condamner aux marges de la société, à élargir les poches de la délinquance, à multiplier les réseaux du trafic de drogue et dont certains terminent fatalement à se convertir en ‘bombes humaines’ (6).

Ainsi, et dans l’intérêt général, pour mieux intégrer les enfants égarés et déracinés, il fallait (et il faut toujours) des enseignants en langue amazighe. De même, par exemple, pour mieux intégrer les enfants des refugiés syriens et irakiens que les autorités allemandes ont accueillis, il faut inclure dans l’ELCO, à côté de l’enseignement obligatoire de la langue allemande, leur langue maternelle : la langue arabe pour les sunnites, perse pour les chiites et kurde pour les réfugiés kurdes.

Par contre l’idée de la ministre française Najat Vallaud-Belkacem, elle-même amazighe d’origine rifaine, qui voudrait enseigner l’arabe dans les écoles françaises, est une idée parfaitement contreproductive. Au lieu d’intégrer prioritairement sa langue maternelle, qu’est la langue amazighe, au lieu d’aider les enfants d’origine nord-africaine à récupérer les valeurs originelles de leur millénaire identité amazighe, basée sur la tolérance, la liberté, et l’égalité, comme le préconisent les valeurs de la République Française, elle veut leur imposer l’enseignement de l’arabe classique, en aliénant les citoyens Amazighs d’Europe d’origine des montagnes de la Kabylie, de la vallée du Souss, des montagne du Rif et des cordillères de l’Atlas. Ainsi, elle essaie de leur imposer «une politique d’arabisation idéologique», qui a déjà ruinée le système éducatif du Maroc et de tous nos malheureux pays de Tamazgha d’une façon impitoyable et irréversible. On dirait que la ministre française ignore que le déracinement et l’acculturation, commencés dans le pays d’origine et qui continuent dans le pays d’accueil, poussent inéluctablement les jeunes musulmans, selon la pertinente étude de Manuel Llamas réalisée à la ville de Melilla, à la radicalisation en faveur des mouvances islamistes (7).

Mme La Chancelière,

Dans ma lettre envoyée récemment au secrétaire général de l’ONU (8), je l’ai souligné que: « les chefs de nos Etats nord-africains et les responsables de gouvernements, que vous avez eu l’occasion de rencontrer, continuent, malheureusement, à mener des politiques de ségrégation injustes à l’encontre de peuple autochtone, que sont les Amazighs, du fait qu’ils s’obstinent à se considérer comme des « Arabes », c’est-à-dire des asiatiques plutôt que des africains, et qu’ils ne ménagent aucun effort pour «arabiser» l’Afrique septentrionale, à cause de leurs idéologies baâtho-islamistes obsolètes et importées du lointain Proche Orient, et qui sont à l’origine de la ruine d’états entiers, comme c’est le cas de la Syrie ou de l’Irak. Tant qu’ils n’assument pas leur vrai amazighité et leur entière africanité, ils continueront à se comporter comme des politiciens de régimes néo-colonialistes aux yeux de nos communautés, alors que la science et la génétique viennent de trancher qu’ils ne sont pas du tout « Arabes ».  Les résultats de l’étude d’anthropologie génétique lancée par National Geographic, sous le nom de The Genographic Project (9), en 2005, révèle, par exemple, que les tunisiens sont irréversiblement Amazighs à 88%, comportant une infime proportion de gènes d’origine arabe, juste 4% ». Les résultats d’une autre étude d’anthropologie génétique vont encore plus loin, celles de l’équipe de l’immunologue espagnol le Dr. Antonio Arnaiz Villena, affirment que les aïeuls de certains peuples européens du pourtour méditerranéen (basques, espagnols, portugais, italiens du sud, siciliens…) ont les mêmes aïeuls que les africains du Nord, et plus précisément du Grand Sahara (10). En plus, les dernières découvertes de l’une de vos institutions allemandes, en l’occurrence l’Institut Allemand d’Archéologie (KAAK), en collaboration avec l’INSAP marocain, ont réussi à entreprendre des fouilles archéologiques dans le Rif oriental  (11) comme celle d’Ifri n Ammar d’Afsou (Mont Arruit à Nador), Hassi Ouinga et Ifri el Baroud (Saka) et démontrent la présence humaine durant toutes les périodes préhistoriques, du paléolithique inférieur jusqu’au néolithique, de la fabrication des bifaces jusqu’à la découverte de l’agriculture. Des résultats qui contredisent catégoriquement la fausse thèse de l’histoire officielle des idéologues arabo-musulmans comme quoi les aïeuls des Amazighs procéderaient de la péninsule arabique et de Yémen !

Mme La Chancelière,

L’UE est liée avec certains de nos pays (Maroc, Algérie et Tunisie) par des accords d’association, qui stipulent qu’un élément essentiel de ces accords est le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l’homme… », et les droits des Amazighs en font incontestablement grande partie. Nous ne comprenons plus le silence assourdissant de vos gouvernements européens, ni de la haute responsable des affaires extérieures de l’UE, en l’occurrence Federica MOGHERINI (12), ni de vos eurodéputées et eurodéputés sur les flagrantes violations des droits humains au Mzab algérien, ni de la répression des manifestations pacifiques des amazighs au Maroc, comme celles organisées dans la région du Rif.

C’est dans ce sens que nous voulons que l’UE, et votre pays, agissent de concert avec nos pays pour imposer le respect des conventions internationales et des instruments internationaux des droits humains. Car la meilleure arme de lutte contre toute dérive autoritaire et contre la propagation du terrorisme islamiste est le renforcement de l’Etat de droit et de ses institutions démocratiques, basés sur la notion de laïcité que le philosophe amazigho-musulman Averroès avait défendu en Andalousie à l’époque de la dynastie des almohades.

Nous tenons à saluer votre détermination d’interdire les manifestations pro-Erdogan en Allemagne, sachant que ce nouveau dictateur islamiste, qui massacre les populations civiles kurdes, est profondément impliqué dans le soutien financier et logistique de ‘Daech’ (comme l’a révélé la presse de son propre pays qu’il a muselée, et comme l’ont aussi révélé ouvertement les medias russes, en l’occurrence la chaine RT). La Turquie n’est pas la seule. A côté de Qatar et de l’Arabie Saoudite, ils constituent les principaux pourvoyeurs des finances de l’international islamiste ‘Daech’. Par contre, au sein de notre vaste territoire de Tamazgha, il existe malheureusement un autre état, en l’occurrence l’Algérie (13), qui utilise le terrorisme à des fins d’élimination d’opposants, comme le chanteur Lounès Matoub, et à maintenir au pouvoir une oligarchie d’officiers militaires corrompus. Ces derniers, qui ont vilement assassiné leur propre président réformateur Mohamed Boudiaf, maintiennent, de façon inconstitutionnelle, à la tête de l’Etat une marionnette morte-vivante. Ils ont le palmarès de soutenir la centrale terroriste AQMI au Sahara, -que Wikileaks avait révélé en mars 2016 (14)-, et que celle-ci avait fait beaucoup d’otages européens dont ceux de vos concitoyens en août 2003.

En définitive, tant que les chefs de l’UE continuent à dérouler le tapis rouge aux dirigeants de ces quatre états affichés, à savoir, le Qatar (15), l’Arabie Saoudite (16), la Turquie et l’Algérie, ils continueront à gaspiller leurs finances en faveur de recrutement de plus de nos jeunes de Tamazgha et des jeunes citoyens européens d’origine nord-africaine aux thèses djihadistes. Tant qu’ils ne prennent pas de décisions exemplaires et courageuses, comme celles de la Suède (17), de stopper tout achat d’armes avec ces pays, l’international islamiste, avec la complicité des USA, aura réussi son sombre pari, celui de déstabiliser notre région euro-amazigh, et de nous embarquer fatalement tous dans la guerre des civilisations !

En vous remerciant de votre diligence, veuillez agréer, Mme La Chancelière, l’assurance de ma considération fort distinguée.

Signé: Rachid RAHA
Président de l’Assemblée Mondiale Amazighe