Lyazid ABID : « Les pays arabo-musulmans voient dans l’existence des Kabyles, des Kurdes et d’Israël un obstacle à leur homogénéité »

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Amnesty International dénonce la répression en Algérie
Amnesty International dénonce la répression en Algérie

INTERVIEW (TAMURT) – Dans cette interview Lyazid ABID, Porte-parole de l’URK, nous a livré son avis sur les droits humains, les conflits qui déchirent le monde, le droit d’Israël à une paix éternelle, la violence que subit le peuple kabyle et sur d’autres sujets. Nous vous la livrons dans son intégralité.

Nous sommes au 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Eu égard à ce qui se passe dans le monde, faut-il la célébrer ou détourner le regard vers d’autres horizons ?

Effectivement, la question mérite d’être posée. En dépit des 75 ans de labeur pour le respect des droits humains, les guerres font rage et notre espèce ne fut jamais aussi cruelle qu’aujourd’hui. Les guerres ne se font plus, entre les hommes, dans les champs de bataille, comme jadis, mais dans les cités. Le bouclier des soldats n’est autre que la population civile. Partout, les humains sont éprouvés, leurs droits sont en net recul. Les Etats les piétinent sans contrainte. À l’échelle des peuples, de précieuses nations peinent à trouver place dans ce monde belliqueux. C’est le cas des Amazighs d’Afrique du Nord comme les Kabyles, les Touaregs, en Asie des Kurdes et du droit d’Israël à une existence paisible au milieu des pays musulmans. Ces peuples vulnérables, qui aspirent à leur reconnaissance définitive, soufrent et risquent de basculer dans la violence pour se faire entendre.

Justement, comment expliquez-vous cette escalade de violence ?

Ces manquements aux droits humains sont souvent perpétrés en s’abritant derrière le sacro-saint principe de l’intangibilité des frontières. Ce principe du droit international, bien que fragilisé par la pratique, demeure un bouclier hautement dommageable derrière lequel des libertés sont piétinées sans retenue. Son maintien ne sert qu’à légitimer les exactions des dictateurs qui refusent à plusieurs peuples de goûter à la liberté. Cette protection internationale acquise, il a suffi, par exemple, à l’Algérie d’actionner sa justice expéditive pour aboutir à des condamnations à mort, à perpétuité, de plusieurs militants pacifistes kabyles.

Comme vous savez, la violence est le propre de la dictature. Elle la pratique au niveau interne et à l’extérieur. L’Algérie combat le terrorisme islamiste chez elle mais elle le soutient quand il est dirigé contre l’occident et Israël. Ces derniers sont dénoncés dans un délire qui rivalise de haine avec celui des terroristes du Hamas palestinien sur ce sujet. Profitant de la division de l’opinion internationale sur les conflits à Israël et en Ukraine, l’Algérie a essayé vainement, par l’intermédiaire d’un parti kabyle, tombé en disgrâce, le FFS, de diviser l’opinion nationale kabyle pour la rallier à ses positions. Je note que même Houari Adi, vivant et exerçant comme professeur en France, suggère, dans un billet publié par le Club de Mediapart, ce 8 décembre, d’importer le conflit palestinien dans les banlieues françaises. Bien sûr, pour in finie déclarer Israël hors-jeux.

Qu’en est-il de la situation en Kabylie ?

La Kabylie travaille d’arrache-pied pour son droit à l’autodétermination. Elle commence à avoir des amis potentiels pour sa reconnaissance internationale. D’ailleurs, c’est pour cela qu’Alger essaye de la diviser pour opposer sa population aux indépendantistes. Bien que le peuple kabyle, dans sa grande majorité, connaisse très bien les pratiques vicelardes de ce pouvoir, il en demeure certains complaisants, comme les opportunistes qui squattent la direction du FFS, pour tenter d’aligner la Kabylie sur les vues antisémites du pouvoir algérien. Pour les donneurs d’ordres, c’est beaucoup plus la Kabylie qui les préoccupe. La Palestine est un pays lointain. Alger cherche à manipuler une partie des Kabyles contre les indépendantistes de l’URK, du MAK et de tous ceux qui se disent Kabyles.

Pour enrayer sa peur du réveil de la Kabylie, le pouvoir algérien a élaboré une stratégie mortifère. Il est allé jusqu’à brûler vifs plus de 250 personnes pour ensuite les imputer aux activistes kabyles, afin de faciliter leur condamnation et de déclarer tous les militants kabyles potentiellement terroristes. Ce scénario était prévisible. Il y a une dizaine d’années, j’avais tenté d’alerter le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, lors de sa visite à Alger, le 31/03/2014, du piège tendu par Alger aux chancelleries occidentales. La duperie consistait à classer les indépendantistes kabyles comme terroristes avec l’aval du secrétaire d’Etat americain. Effectivement, ce classement a eu lieu, 7 ans plus tard, juste avant l’engagement formel du Maroc, le mois de juillet 2021, à soutenir le droit du peuple kabyle à son autodétermination, mais sans l’aval ni reconnaissance de ce classement par les USA.

Quelle est la position de votre mouvement politique, l’URK, sur le conflit entre Israël et le Hamas ?

Alors que tous les peuples du monde sont convoqués devant le tribunal des médias à se positionner pour l’une ou l’autre partie du conflit au Moyen-Orient, le peuple kabyle ne peut pas faire exception. Sa grande majorité a choisi le soutien indéfectible au peuple juif qui aspire à vivre en paix sur la terre de ses ancêtres. Au sein de mon mouvement, l’Union pour la République Kabyle (URK), même si nous souhaitons une politique d’apaisement avec Alger, nous condamnons, sans équivoque, l’attaque terroriste de Hamas contre l’Etat d’Israël.

Notre soutien à l’Etat d’Israël, dans sa défense contre la barbarie, est indéfectible, toutefois en laissant la possibilité aux Palestiniens d’ériger leur propre Etat. Le soutien de l’URK au Peuple juif est un impératif moral majeur. C’est une question d’intérêt supérieur de la Nation kabyle. Les pays arabo-musulmans voient dans l’existence des Kabyles, des Kurdes et d’Israël un obstacle à leur homogénéité. Ils déploient toute leur force, économique, financière et politique pour maintenir Tamazgha et le Kurdistan désagrégés, pour exacerber l’errance de ces peuples à travers le monde et pour empêcher Israël de vivre en paix. 

Les Kabyles, révoltés et épris de justice, gagneraient à  combattre l’injustice d’abord chez eux, dans leurs cités, dans leurs villages, avant de chercher à guerroyer avec les Palestiniens contre les Juifs, en Asie. Au lieu de s’en prendre aux Juifs et de rêver de la lointaine Palestine, ils gagneraient en honorabilité à se libérer eux-mêmes de la tyrannie algérienne ou à aider les Chrétiens kabyles à mettre fin aux exactions qu’ils subissent régulièrement de la part du pouvoir algérien qui les empêche d’exercer leur culte librement.

Quel est votre message à la communauté internationale à l’occasion de la célébration du 75e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’homme ?

La communauté internationale sait, depuis la bravoure des femmes de Kobané, que dans un Kurdistan indépendant, doté d’une armée puissante, Daesch n’y aurait jamais vu le jour. Si un Etat ou des Etats amazighs souverains existaient en Afrique du Nord, il n’y aurait jamais eu, en Algérie, l’assassinat de 200 000 civils et des milliers de disparus, entre 1992 et 1999. Ces peuples sont imbibés de cultures fortes et profondes. Ils forment un rempart infranchissable contre tous les intégrismes. Ils sont l’unique garantie pour la stabilité de ces régions, si particulières.

La communauté internationale doit agir avec force et sans perdre de temps, pour réhabiliter ces trésors de l’humanité dans leur droit à l’existence en tant qu’Etats et nations. Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui quand le droit d’un Kurde, d’un Kabyle, d’un Juif, d’un Ukrainien ou autre n’est pas respecté, c’est tout de suite ressenti à Paris, Berlin, Londres, Sidney et Washington. Ne dit-on pas que les droits humains sont l’affaire de tous ?

Conjuguer ces manquements des droits humains à l’épineuse question du dérèglement climatique, de la sécurité sanitaire…, suggère l’urgence d’une solution imminente, novatrice et globale. Les déclarations universelles ne suffisent plus. Les droits humains ont besoin d’un cadre contraignant bien élaboré qui surclasse les blocs et leur équilibre. Une telle organisation doit aussi être empreinte de justice, d’éthique, d’empathie et surtout de rigueur. C’es la condition pour assurer le respect des droits humains, de la sécurité des peuples et la stabilité dans le monde.

Quel est votre message pour le régime algérien ?

Avec l’Algérie, l’URK ne cherche pas la confrontation mais l’apaisement. Nous ne sommes animés d’aucune animosité envers les arabophones ou les Arabes de ce pays. Il est évident que pour survivre à la fin des énergies fossiles, l’Algérie gagnerait à apaiser ses relations avec les peuples qui la composent même quand ces derniers demandent d’user de leur droit à l’autodétermination. Je demande au régime algérien de libérer tous les prisonniers politiques kabyles car les méthodes de leurs arrestations, les mobiles retenus contre eux, la manière dont ils sont jugés et les conditions de leur incarcération font d’eux des otages de guerre.

Notre peuple est soumis à une justice expéditive digne des sombres nuits coloniales. Le projet zéro Kabyle, entamé depuis l’élimination d’Abane Ramdane en 1957, n’honore pas l’Algérie. Au contraire, il accélère son effondrement d’autant plus que la répression n’a jamais vaincu les peuples décidés à se libérer. L’Algérie doit savoir que la Kabylie est en phase avec le sens de l’histoire et que l’avenir lui sourit déjà.

Propos recueillis par Aksil K.

6 Commentaires

  1. ce qui fait obstacle, en premier lieu aux revendications d’émancipation du peuple kabyle et aux thèses des indépendantistes, ce n’est pas un pouvoir de bandits que l’on connait ses méthodes racistes, mais malheureusement c’est de l’intérieur de la  » maison » se sont les deux secte RCD ET FFS dit partis kabyles, avec ce régime de voyous il ya  » à boire et à mange »

    pour parvenir à ce qu’il veut, arrivée à ses fins, saboter la kabylie progressiste, ce pouvoir de malfaiteurs a crée et inonder la kabylie de milliers d’associations de faux moujdahid et des milliers d’organisations de faux fils, de cousins, d’oncles, de frères, beau fils de chahid et plus des organisation islamistes et dérivée , force et de constater qu’une frange de la population en kabylie sont des rentiers et que leurs seule activité et la délation, certain font dans la délation malgré eux et par peur de représailles, c’est dans l’urgence absolue d’inverser cette situation de pourrissement, sinon ADIEU LA KABYLIE , et que dieu nous préserve

  2. Les Kurdes ont subi la même politique coloniale que imazighens. Leur énorme espace gographique est morcelé en plusieurs parties de manière à les diviser et en faire des minorités. L’arabisation comme partout où règné le colonialisme. On Afrique les français,chez eux les anglais à l’origine des saouds. On a fait croire à ses peuples de l’Asie mineure,rendue l’Orient (arabe)qui n’avait jamais existé avant. A l’image de l’Afrique du nord rendue arabe habillée des attributs culturelles et civilisationnels des autochtones millénaires. Nombreux croient à la fausse histoire arabe cousue de toutes pièces par ces colonisateurs. L’arabisation est leur création. Les dits arabes ne sont que des continuateurs qui croient à l’histoire des colonisateurs. D’ailleurs partout ce sont ceux-là à qui on a confié les règnes. Leur institut du monde arabe inventé se trouve bien en France et non en Arabie.

  3. ARTE TV a programme pour ce mois ci un documentaire thématique sur l’autodétermination et jusqu’à l’indépendance de la jeune république d’Irlande du nord ce qui est frappant et qu’il ya des similitudes entre le peuple irlandais et kabyle le même caractère rebelle et fière le même but chasser l’oppresseur, l’envahisseur et la soif de liberté.

    l’argument des KDS complice du régime des voyous et que la kabylie ne survivra pas a l’indépendance économiquement et faux, actuellement au classement des nations l’irlande et la 21 économie du monde alors que c’est une ile avant son indépendance, les irlandais ne vivaient que d’élevage de moutons et production de laine et fabrication de bière, un peuple insulaire courageux partis de rien et fière un exemple a suivre

    voici le lien La révolution irlandaise : https://www.youtube.com/watch?v=lfCS2cvbAlI&ab_channel=ARTE

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