U Xaldum, un rempart intellectuel contre l’islamo-arabisme conquérant et conflictuel

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Ibn Khaldoun
Ibn Khaldoun

CONTRIBUTION – « L’épée comme la plume sont des instruments dont se sert le souverain pour conduire ses affaires. Dans les débuts d’un État, tant que ses membres sont occupés à établir leur pouvoir, le besoin pour l’épée est plus grand que pour la plume. » Ibn Khaldûn, la Muqaddima.

Je n’ai pas l’intention encore moins la prétention de vous présenter, à supposer que je possède l’érudition nécessaire, Ibn Khaldûn (Tunis, 1332 – Le Caire, 1406), synonyme d’une œuvre considérable et d’une réputation jamais démentie. L’œuvre culmine en un monument d’historiographie et d’intelligence : ‘’Le Livre des exemples’’ (« Livre des enseignements et traité d’histoire ancienne et moderne sur la geste des Arabes, des Persans, des Berbères et des souverains de leur temps »), accessible aux curieux et lecteurs intéressés grâce à la traduction française1. Sa théorie de l’ « Histoire universelle » qui fut l’œuvre de sa vie et dont la ‘’Muqaddima’’ n’est que l’Introduction (Les Prolégomènes), est fondée sur une opposition irréductible entre ‘’nomades’’ et ‘’sédentaires’’.

La réputation est celle d’un musulman éclairé, rompant avec les contraintes de la théologie pour arracher à une religion obscure le trésor d’une science anthropologique où notre pensée moderne peut retrouver son bien. ‘’Authentiquement rationaliste’’, il possède un savoir épuré, soumis aux critères de vérification, d’une théorie systématique, englobant géographie, origine des pouvoirs, lois de la croissance et du déclin des empires, examen des autorités telles qu’elles sont et non telles qu’elles devraient être.

La mystique d’Ibn Arabî (Murcie 1165 – Damas 1240), théologien, juriste…, ou d’Ibn Sabîn (Murcie 1216 – Mecque 1269), philosophe et soufi, les âpres débats suscités par Ghazali (Tus 1058 – Tus 1111), soufi, et la démarche du savant Averroès (Cordoue 1126 – Marrakech 1198) de sauver la philosophie d’Aristote (Stagire -384 / Chalcis-322) ne l’intéressent guère. Ibn Khaldûn a « par stricte orthodoxie religieuse, clairement défini la frontière entre Dieu et le monde des hommes. » Il ne veut pas se mêler de discussions stériles. Ce désintérêt « signifiait la soumission humble, pratique et quotidienne aux lois dictées par la religion. » Aujourd’hui, deux grandes voies s’affrontent en islam. L’une est celle de la spiritualité philosophique d’Averroès. L’autre est incarnée par l’islam politique qui ne tolère aucune voie civilisatrice. Cet islam politique est figuré par l’islamisme (qu’il soit « violent » ou « modéré », la seule différence entre les deux épithètes étant dans les moyens mis en œuvre et le temps pour faire triompher l’idéologie, car il n’y a qu’un seul islam, n’en déplaise aux dévots et autres tartufes qui fabriquent des euphémismes pour éviter de nommer les choses) qui est simplement la conviction que les lois de l’islam doivent prédominer sur les lois des hommes. L’objectif est le même : la soumission du monde à une législation considérée comme dictée par Dieu. Avec, par-dessus le marché, la mise au pas de la société. « L’islam domine et ne saurait être dominé » est une sentence d’Abû al-Qâsim dit Maḥomet (Mecque 570 – Médine 632) retenue dans la Tradition (Sūnna)… Il est, par conséquent, illusoire, au vu de cet axiome, ce verdict inquisitorial et absolu, de vouloir aborder la place de la religion mahométane – le cheval de Troie de l’arabisme – au sein de la société kabyle. Les xwan d’Ibn Hanbal (Bagdad 780 – Bagdad 855), Ibn Taymiyya (Harran 1263 – Damas 1328) et leurs « frères idéologiques » des temps modernes recourent aux armes pour ramener les « brebis galeuses » et autres « impies » sur la voie de l’« authenticité du message » et éradiquer nos marqueurs identitaires (coutumes, langue, Yennayer…). D’ailleurs, la violence2, un tabou majeur, a accompagné l’islam depuis les débuts de la « Révélation » (ou « Inspiration », selon ses propres principes, croyances et valeurs), entamée vers 610 dans une grotte du mont Ḥiṛā. Chez le musulman, Dieu « est tout et c’est tout. » Circulez, y’a rien à zyeuter !

Les gouverneurs islamo-arabes en Tamazgha centrale, notamment en Kabylie, après avoir travaillé, modelé, conditionné et uniformisé les esprits et les cerveaux des enfants amazighs, une masse juvénile, fragile, influençable et malléable à souhait, auxquels on inculque des contre-vérités historiques en leur attribuant une mythique origine orientale, les idéologues ethnocidaires tapis dans l’ombre des décideurs s’attèlent à ‘’démagnétiser’’ la mémoire des personnes âgées, surtout des femmes, temple de notre oralité. De quoi s’agit-il ? D’ « alphabétiser » les femmes détentrices de notre patrimoine immatériel ! En procédant à ce travail de ‘’dépersonnalisation culturelle’’, on coupe le cordon mémoriel entre elles et les jeunes, et on les éloigne davantage quotidiennement de la réalité historique en les orientalisant et en les initiant à la doctrine wahhabite pour laquelle l’ordre moral se voudrait dichotomique : le licite (ḥalal) et l’illicite (ḥaṛam). Le territoire que gouverne l’islamo-arabisme a des difficultés à concevoir la diversité en général et celle des langues en particulier et voudrait adapter les vastes terres de Tamazɣa à la ‘’monoculture linguistique’’. Bien qu’institutionnalisée en février 2015 – une escroquerie politique en vérité et nous serions de grands naïfs d’espérer quelque charité de la part d’un colonialisme déterminé plus que jamais à faire des Kabyles des Aztèques de l’Afrique du Nord-, tamaziɣt est sacrifiée sur l’autel de l’islamo-arabisme, seule la langue de ‘’Mamadou le Qurayshite’’, ‘’digne de louange’’, devenue la norme et imposée à tous les habitants du pays, a droit de cité. L’enfer est bien pavé de bonnes intentions… On voudrait alphabétiser, c’est-à-dire arabiser des personnes âgées, dépositaire d’un savoir sans doute appelé à disparaître, qui en ont nullement besoin d’apprendre la langue levantine.

L’ESPRIT CONTRE L’ÉPÉE DE LA TYRANIE RELIGIEUSE

« Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »
Étienne de la Boétie

Ibn Khaldûn fait partie des géants de la réflexion politique qui ont émergé dès le XVe siècle : Nicholas Machiavel (1469-1527) -Le Prince-, Étienne de la Boétie (1530-1563) -Discours de la servitude volontaire-, Charles de Montesquieu (1689-1755) -Esprit des lois-, Max Weber (1864-1920) -L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme-, Émile Durkheim (1858-1917) -Les Formes élémentaires de la vie religieuse- qui considère que « la religion n’est pas seulement un système d’idées, elle est avant tout un système de forces », c’est « elle [qui] structure la société », Auguste Comte (1798-1857) -Discours sur l’esprit positif-, Karl Marx (1818-1883) –Capital- pour qui la religion, « cet opium du peuple » est la superstructure alors que U Xaldun la considère comme l’infrastructure,…

Fasciné par le déclin des dynasties, Ibn Khaldûn a proposé une véritable théorie de la construction de l’État. C’est par ce dernier que passent la sédentarisation, la pacification et la prospérité. Les concepts de son œuvre se déclinent par des « dualités » : « bédouins » et « citadins » (concept clé que l’on traduit par « nomades » et « paysans », voire « Arabes nomades » et « Berbères paysans », mais l’historiquement correct rejette cette dernière dualité et rend la grille de lecture et d’interprétation d’Ibn Khaldûn délicate) ; « maîtres » et « serviteurs », « ancêtres » et « oubli »… Son œuvre recèle une somme considérable de connaissances sur son milieu social et culturel et traitant de questions qui servent à expliquer successivement les faits qui se rattachent à l’essence même de la société. L’ensemble de son œuvre présente trois concepts : « la civilisation » (‘’l’homme est fait pour vivre en société’’), « la solidarité », l’esprit de corps ou de clan (qui n’existe que ‘’chez les gens qui tiennent ensemble par les liens du sang’’), enfin « le pouvoir » (la souveraineté de État). La publication partielle de son œuvre dès 1830 suscite l’intérêt du ministère français de la Guerre et demande, en 1840, que l’on traduise le ‘’Livre de l’enseignement’’ d’Ibn Khaldûn pour enrichir sa connaissance des tribus occupant le territoire (celui-là même qui prendra le nom d’ « Algérie » à partir de 1839) que le royaume de France (Charles X (1757-1836) puis du dernier roi de France, Louis-Philippe (1773-1850)) entend soumettre. La tâche est réalisée par le baron de Slane (1801-1878) en 1852-1856. Ibn Khaldûn fut donc mêlé, malgré lui, à la colonisation de l’Afrique du Nord.

Les recherches portant sur son œuvre furent mises sous le boisseau au pays des « Îles-usions » et dans le monde dit arabe. Même l’Égyptien, Taha Hussein (1889-1973), qui, pourtant, lui consacra, en 1919, sa thèse de doctorat à la Sorbonne, de retour dans son pays, s’en détourna. Il était probablement moins dangereux de s’attaquer à l’islam (T. Hussein n’a-t-il pas écrit, dans un poème : « Ou adorai-je Satan qui nous a envoyé le dernier des prophètes ») que de diffuser, vulgariser l’œuvre d’Ibn Khaldoun, laquelle oeuvre donne une image en contradiction avec celle colportée par le panarabisme naissant. En Afrique du Nord, tout le monde connaît, de nom en tout cas, U Xaldun, cet homme épris de culture, et chacun des trois pays, étiquetés arabes, revendique son prestige intellectuel, cependant, personne ne veut assumer que « les gouvernants sont par nature étrangers au monde de leurs sujets » et admettre que « l’Histoire est la mémoire des peuples » (selon U Xaldun), car ces mandarins s’attèlent avec acharnement à sa falsification. À la différence de puissance s’ajoute la distinction et souvent l’hostilité ethnique où d’infinies minorités de guerriers conduisent d’immenses troupeaux de producteurs. Cette situation est de règle dans l’histoire de l’islam depuis l’infime minorité des conquérants arabes à l’infime minorité de Turcs ottomans qui imposèrent leur joug trois siècles durant à l’Afrique du Nord, à l’exception de sa partie occidentale, alors et toujours aux mains de monarques descendants du prophète quṛayš, claironnent-ils du haut des minarets, ces « fusées qui ne décollent jamais » comme les appelle si joliment Kateb Yacine. Ces entreprises conquérantes imposent aux vaincus un lourd tribut : la dépersonnalisation.

Ibn Khaldûn, cité par B. Sansal3, dit des Orientaux : « Les Arabes se sont entendus pour ne jamais s’entendre. » Sauf quand ils doivent combattre les Imazighen en général et les Kabyles en particulier, aurait-il dû ajouter ! Avec ces mots terribles à l’encontre du peuple ‘’Élu de Dieu’’ (chaque Arabe musulman est profondément convaincu qu’il a ce privilège) et la description qu’il fait des mœurs des Arabes dans Les Prolégomènes (Al-Muqaddima), le savant musulman choquerait par son caractère ‘’raciste’’ si la lecture du texte n’était pas replacée dans son contexte. À propos des pays conquis par les Arabes, voici ce qu’il en écrit :
« Ils passent ordinairement toute leur vie en voyage et en déplacement, ce qui est en opposition et en contradiction avec une vie fixe, productrice de CIVILISATION. Les pierres, par exemple, ne leur servent que comme points d’appui pour les marmites : ils vont les prendre dans des édifices, qu’ils dévastent dans ce but. Le bois leur sert uniquement à faire des mâts et des piquets pour leurs tentes. Pour s’en procurer, ils démolissent les toits des maisons. Leur existence est essentiellement en opposition avec la construction, qui est à la base de la CIVILISATION. Tels sont donc les Arabes en général. […] Enfin, ils veulent tous le commandement. Rarement un Arabe concédera le pouvoir à un autre, fût-il son père, son frère ou l’aîné de sa famille. […] Quand les Banû Hilâl et les Banû Sulaym y vinrent [en Afrique du Nord] au Ve siècle [de l’Hégire, i.e. au XIe siècle après J.-C.] et qu’ils s’y furent battus durant trois cent cinquante ans, ces pays connurent le même sort que les trois premiers [Yémen, Irak et Syrie] : leurs plaines furent complètement ruinées. Autrefois, toute la région s’étendant entre le Soudan [au Moyen Âge, le Soudan – Bilad es-Sudan, pays des Noirs – est la région intertropicale, sans aucun lien avec l’actuel Soudan] et la mer Byzantine [Méditerranée] était urbanisée, comme en témoignent encore les vestiges de la civilisation : monuments, sculptures, ruines de villages et de bourgades. » Ibn Khaldûn poursuit : [À l’époque préislamique] […] et la civilisation du Maghreb3 était également très florissante. […] Toute la civilisation du Sud […] s’est écroulée. C’est particulièrement vrai du Maghreb. Il ne reste que très peu de vestige [après l’arrivée des Arabes] de sa civilisation ; ils s’étendent sur une étroite bande d’à peine deux journées de marche [50 à 60 km] le long du littoral. […] Le vide créé dans le Sud [par les Arabes] ne restera pas sans suite. Ce vide peut s’expliquer soit par des manifestations terrestres et de la civilisation visible – et ce ne peut être dans ce cas que la conséquence de la mainmise des Arabes et de leur domination, laquelle entraîne la ruine des pays dominés. » (Ibn Khaldûn, Le Livre des exemples, pp. 1207-1208). L’Astrologie de Nostradamus comparée à la vision intellectuelle lucide et pertinente d’Ibn Khaldûn, c’est de la roupie de sansonnet.

Les propos d’Ibn Khaldûn relatifs aux Imazighen sont certes dithyrambiques, mais force est de reconnaître qu’il a observé en ethnologue averti leurs tribus avec intelligence en « soumettant les faits au jugement de la raison. » Le troisième livre de « Kitâb al-Ɛibar » comprend l’Histoire des Berbères et de leurs parents, avec l’indication de leur origine, de leurs diverses tribus, des empires qu’ils ont fondés en Afrique du Nord.

«[…] Les Berbères ont toujours été un peuple puissant, redoutable, brave et nombreux ; un vrai peuple comme tant d’autres dans ce monde […] Citons ensuite les vertus qui font honneur à l’homme et qui étaient devenues pour les Berbères une seconde nature, leur empressement à s’acquérir des qualités louables, la noblesse d’âme qui les porta au premier rang parmi les nations, les actions par lesquelles ils méritèrent les louanges de l’univers, bravoure et promptitude à défendre leurs hôtes et clients, fidélité aux promesses, aux engagements et aux traités, patience dans l’adversité, fermeté dans les grandes afflictions, douceur de caractère, indulgence pour les défauts d’autrui, éloignement pour la vengeance, bonté pour les malheureux, respect pour les vieillards et les hommes dévots, empressement à soulager les infortunés, industrie, hospitalité, charité, magnanimité, haine de l’oppression, valeur déployée contre les empires qui les menacent, victoires remportées sur les princes de la terre[…]; voilà pour les Berbères, une foule de titres à une haute illustration, titres hérités de leurs pères et dont l’exposition, mise par écrit, aurait pu servir d’exemple aux nations à venir[…] On a vu chez les Berbères des choses tellement hors du commun, des faits tellement admirables, qu’il est impossible de méconnaître le grand soin que Dieu a eu de cette nation, l’extrême bonté qu’il lui a toujours témoignée, la combinaison de vertus dont il l’a dotée, les nombreux genres de perfection auxquels il l’a fait atteindre et toutes les diverses qualités propres à l’espèce humaine qu’il lui a permis de réunir et de s’approprier. À ce sujet, leurs historiens rapportent des circonstances qui remplissent le lecteur d’un profond étonnement.» (Ibn Khaldûn, Histoire des Berbères, Paul Geuthner, Paris 1968, t. I, p.199, 200,202, 203).

Des intellectuels musulmans, notamment tunisiens, ont soumis l’islam à un regard des plus lucides et démystificateurs (tels que : ‘’Le Coran est-il authentique ?’’, ‘’L’Exception islamiste’’, ‘’La Femme dans la charia’’, etc.), alors pourquoi l’arabisme n’aurait-il pas son « nouvel Ibn Khaldûn » pour dévoiler son véritable visage ?

Le pays des « Îles-usions » ou Algérie a délimité pour nous, un espace à l’intérieur duquel on a beau se déclarer Amazigh, on est, en fait, répertorié et classé depuis fort longtemps que nous faisons partie d’une civilisation disparue dans les abysses de l’Histoire depuis le VIIe siècle. Les gouverneurs arabes en Tamazgha centrale ne sont visiblement pas des élèves assidus au cours d’Histoire ; aussi s’entêtent-ils encore à prouver l’existence de la quadrature du cercle du monde… arabe auquel ils nous lient. Ils ont même déclaré « Alger, capitale de la culture arabe 2007 5.» Nombreux étaient les naïfs à avoir participé aux célébrations avec ṭṭvel et zûṛna. Plus Arabe qu’un Algérien, tu meurs ! Et j’appelle « Arabe » toute personne se prévalant de cette qualité ou se comportant, mentalement et culturellement, comme telle.

Quand un Kabyle émet un avis relatif aux arabo-musulmans ou exprime son refus de se liquéfier dans la mare stagnante sentant le remugle de l’arabisme virulent et purulent, il est automatiquement taxé d’islamophobe, d’arabophobe et surtout d’agent de la « main étrangère », une antienne que l’on entend depuis les premiers balbutiements du berbérisme. Aux yeux des Arabes de Tamazgha centrale (il est utile de le préciser, car il existe, ailleurs, des Arabes, chrétiens voire juifs), le Kabyle, est « raciste, mécréant, athée, berbéro-matérialistes », voire « traitre à la patrie6 » (celle que Ferhat Abbas n’a pas découverte). Ibn Khaldûn, l’auteur de cette phrase : « Un pays arabisé est un pays ruiné » et des citations précédentes, Ibn Khaldûn dis-je, serait donc un « agent de l’étranger » avant la lettre. Lui, le cadi qui rendait la justice, serait, par conséquent condamné de nos jours par le tribunal de la vox populi7 comme le fut Socrate. Il resterait suspendu au gibet de l’ « orthodoxie arabe » en attendant que les corbeaux d’EL (divinité sémitique qui a donné ‘’Elohim’’, ‘’Allah’’) vinssent lui arracher ses viscères. L’universitaire Leila Salem n’hésite pas à affirmer que « ce génie hors norme a légué aux Magrébins en particulier et aux musulmans en général un trésor inestimable, qui est malheureusement peu et mal étudié. Une autre lecture d’Ibn Khaldûn plus intelligente et plus profonde pourra certainement les aider à comprendre la racine de leurs maux afin d’apporter les remèdes nécessaires pour sortir de cette léthargie. » D’aucuns savent que si Ibn Khaldûn vivait encore, on le traiterait comme un vulgaire malandrin, malotrus à l’instar des Kabyles M. Arkoun (1928-2010), M. Mammeri (1917-1989)…, ostracisés, vilipendés par des ignares, des cerbères gardiens du Temple de l’islamo-arabisme. Aux doctrines de l’islamo-arabisme, tapies derrière la « rhétorique patriotique », il faut opposer les écrits de U Xaldun8.

La civilisation musulmane a été fortement marquée par la richesse des apports des divers peuples islamisés. Ces derniers, arabisés au fil des siècles, ont perdu toute authenticité, originalité et créativité. Ils se sont alors enfermés dans des dogmes religieux et la civilisation musulmane est tombée dans une phase de panne historique et créative. Ces peuples arabisés sont réduits alors au simple rôle de médiateurs. Les Arabes ne maîtrisent pas leur propre histoire et entravent la nôtre avec des liens ‘’divins’’ aussi solides que les nœuds de pêcheur double. Un jour, takubba les tranchera !

S.A. AÏT AMEUR

1. L’original de ‘’Histoire universelle’’ compte 3 000 pages en arabe.

2. Faṭima (604-632) aurait été malmenée puis battue par Ɛumaṛ (584-644), le futur calife, le « ṛ-ṛašidun, le bien guidé », si bien qu’elle a succombé aux coups de l’homme qui succèdera à Abū Bakr (573-634), ce dernier succédant à Maḥomet, (chef religieux, d’État et de guerre de la ɛumma), rapporte Hela Ouardi, universitaire et chercheuse tunisienne.

3. Sansal Boualem, Gouverner au nom d’Allah, Gallimard, Paris, p. 112.

4. Je récuse le terme connoté ‘’Maghreb’’, cependant je le garde car il est dans les textes des auteurs cités.

5. Inaugurée et soutenue par Lalla « Fanm dobout », pourtant revendiquant une origine amazighe. Lors d’une réception à l’Élysée, en compagnie du beylerbey de la Régence, elle était sapée en ottomano-mauresque… Sans doute pour montrer que l’orientalisme d’Eugène de Lacroix avec « Femmes d’Alger » est toujours vivace.

Lalla « Fanm dobout », ex-passionaria du féminisme, ex-« opposante », est devenue une mercenaire politique récupérée pour brouiller, parasiter le combat identitaire, lequel combat ne l’a, au grand jamais, intéressé même quand elle fut membre d’un parti « culturaliste », car tamazight est « chose insignifiante » à ses yeux. Lalla « Fanm dobout », dont l’ego politique toise effrontément Tamguṭ (sommet du Djurdjura culminant à 2308 m, appelé aussi « Lalla Xdiǧa », à ne pas confondre avec l’autre Tamguṭ, colline dominant Azeffun), grandiose marqueur identitaire minéral de la Kabylie occidentale, avait soutenu, sans bafouiller, à la télévision française devant l’anthropologue du fait religieux, Bruno Étienne (1937-2009) que le Coran, je cite de mémoire, a amélioré le sort de la femme kabyle. Il va sans dire que cette affirmation est purement mensongère. Curieusement, ce « Coran avant-gardiste et bienfaiteur » a oublié cet adage : « charité bien ordonnée, commence par soi-même. » Il faut savoir que les femmes de la patrie de Mahomet, qui, jusqu’à présent, sont considérées comme des mineures à vie puisqu’elles ont besoin d’un « tuteur », de sexe masculin, il va de soi, pour se marier, entre autres, n’ont pas été touchées par la grâce de ce geste humaniste. En revanche, il a probablement mis fin à la malédiction qui frappait les bébés de sexe féminin que l’Arabie enterrait vivants. La narratrice du livre « Brûlée vive », une Palestinienne de Cisjordanie, rapporte que sa mère, « avec une couverture en laine, elle [les] étouffait. Je l’ai vu de mes propres yeux […]. Cela se faisait devant tout le monde. »

Au lieu de se déclarer défenseure de l’amazighité, Lalla « Fanm dobout » a préféré se placer sous les fourches Caudines d’un « Système » viscéralement anti-kabyle et puissamment arc-bouté au concept islamo-arabiste, au son de la Fātiḥa avalisée par le nabot de la pensée, celui-là même qui a prêté serment devant « Sidi Johnny Walker » que « Tamazight ne sera jamais langue officielle. » Lalla « Fanm dobout », a imité d’autres nervis issus de la Kabylie, cette terre à la culture de solidarité légendaire, que l’on croyait fière et altière, ne s’enchaînant ni par la crainte ni par les bienfaits, qui se sont mis sous leɛnaya de quelques épaulettes étoilées manipulatrices – obscurcissant ou illuminant le ciel du pays des « Îles-usions » au gré de leurs humeurs – espérant récolter qui un ministère, qui un destin national, qui un strapontin, qui une notabilité locale, qui un croupion. Mais au pays des « Îles-usions », les bachibouzouks de la Régence savent jouer merveilleusement du miroir aux alouettes et, si nécessaire, de l’aṭaɣan. Ces hommes de main ont fait fi de cet adage que Aqquṛ, oiseau au chant mélodieux, nous a légué, au temps où les animaux parlaient : « ur ttamen aẓveṛvuṛ ama zegzaw ama yeqquṛ » (‘’ne fais jamais confiance à la lambruche’’).

Après que Lalla « Fanm dobout » a célébré démesurément l’évènement appelé « Tlemcen capitale de la culture islamique 2011 », une autre imposture est inaugurée : « Constantine, capitale de la culture arabe 2015 ». À quand « Tizi Wezzu ou Vgayet, capitale du niqāb et de l’abaya » et « ⵜⵎⵏⵗⵙ ⵜ ou Taɣerdayt, capitale de la babouche, du ɛiqāl et du šemāɣ ? » [Le ɛiqāl étant la « corde » qui maintient le šemāɣ (coiffe traditionnelle) sur la tête des bédouins. C’est de là que vient le terme « Izukar », en référence aux « cordes », que l’on utilise pour désigner les Levantins].

6. Les tenants de ce langage oublient que sans les Imazighen montagnards, ils seraient encore gardiens de cochons des colons dans la Mitidja ou ailleurs et à se lamenter quotidiennement sur leur sort en psalmodiant quelques prières adressées à leur divinité, qui, cependant, restera muette.

7. « Ayen nnan medden iwata, yessefk umayeg i tyita » (« Quand le public a décidé qu’une chose est nécessaire, il n’y a plus qu’à s’incliner »).

8. « Ibn Khaldûn est un Berbère. L’orgueil, justifié, d’être de ce ‘’ce grand peuple’’ se montre fréquemment dans ses œuvres. Mais il cède à un travers fréquent dans son pays, celui de vouloir posséder une ascendance arabe. » Ce « snobisme » réapparaît à chaque instant et Ibn Khaldûn lui-même le dénonce dans son Histoire des Berbères, lorsqu’il écrit : « Quand j’exposerai en détail les ramifications de chacune de ces tribus que je viens de nommer, j’aurai l’occasion de rappeler ces prétentions à une origine arabe, prétentions que je garde comme fondées. »

Ibn Khaldûn est un « croyant convaincu de la supériorité de l’islam, mais il sépare nettement la relation spirituelle de l’individu au divin, qui fonde sa vie morale, des relations des hommes entre eux, qui obéissent aux lois naturelles voulues par Dieu une fois pour toutes » (André Burguière, Le Nouvel Observateur, 2006).

Abd al-Qadeṛ (1808-1883) dont la famille est originaire du Rif, c’est-à-dire amazighe, revendiquerait une ascendance chérifienne (arabe). Son arrière-petit-fils, Razzaq Abdel al-Qadeṛ (1914-1998), militant communiste, « kibboutziste » notoire, « ennemi de la nation arabe » selon une certaine presse, suppôt de l’islamo-arabisme, et créateur d’un maquis éphémère en Kabylie au lendemain de l’indépendance, a affirmé à Muhend Aarav : « Je ne suis pas ‘’comme Berbère’’ ; je suis Berbère. » (M. A. Bessaoud, L’Histoire de l’Académie Berbère, 1966-1978, 2000, p. 19). Pourtant, son arrière-grand-père n’était pas allé de main morte pour qualifier le soulèvement kabyle de 1871 : « Je dénonce cette insurrection contre la justice, contre la volonté de Dieu et la mienne. Nous prions le tout puissant de punir les traitres et de confondre les ennemis de la France ». Abdel Qadeṛ s’était probablement souvenu du « couscous noir » que les Kabyles lui promettaient, après qu’il eut dégusté le vrai et délicieux seksu, de servir s’il avait la hardiesse de revenir chez eux pour les enrôler sous son autorité.

Quant à la prétendue « origine chérifienne » (c’est-à-dire quṛayš, donc arabe) des imṛavḍen-marabouts-almoravides-Al-Murābiṭūn, des Iznagen (Sanhadja) originaires du Sahara occidental, elle relève du fantasme. C’est une imposture qu’aucune Mairie de l’Histoire n’a ni « pacsée », ni « ḥalalisée. » Ils préfèrent lier leur « sanguinité » à celle de Ɛuqba, un esclavagiste de la pire espèce, plutôt qu’à celle de Kahina ou Yugurta.

1 COMMENTAIRE

  1. Voilà ce que dit un arabe de boumedien e et benbella les porte drapeau de l’ arabisation:

    Le politologue, universitaire et spécialiste des relations franco-algériennes Naoufel Brahimi El Mili s’est exprimé dans une interview accordée au quotidien francophone El Watan sur les relations passionnelles qu’entretient l’Algérie avec la France. Il est revenu sur son livre en deux tomes intitulé « 50 ans d’histoires secrètes ».

    Retour sur l’intérêt que porte l’auteur à l’Algérie
    D’emblée Naoufel Brahimi El Mili revient sur l’intérêt qu’il porte à l’Algérie et les mésaventures qu’il a eux avec les autorités à cause des papiers qu’il a signés par le passé. Parmi ceux-là, « Caisses pleines et ventres creux ». Il affirme que ses articles critiques envers l’ancien président Abdelaziz Bouteflika sur les deux journaux Le Quotidien d’Oran et Le Soir d’Algérie ont été censurés, tout comme son livre sur le printemps arabe intitulé « Pas de printemps pour les Arabes », que son éditeur a délibérément transformé en « Le printemps arabe : une manipulation ? »

    Ben Bella, agent français ; Boumédiène collaborateur de de Gaule ; Chadli, marionnette de Mitterrand
    Naoufel Brahimi El Mili fait un résumé sur le premier tome de son livre, où il parle des présidents successifs de l’Algérie indépendante. Il fait référence à des passages tels que « Benbella est un agent français », « Boumdiène était un excellent collaborateur de de Gaulle » et « Chadli s’est fait avoir par Mitterrand ». Il explique ses louanges à Abdelaziz Bouteflika et l’habilité de celui-ci à prendre le pouvoir et redonner à l’Algérie un rayonnement entre les nations.

    Les Présidents français et la bénédiction de l’Algérie
    L’auteur a aussi signalé la censure de son livre, où il parle de la duplicité des autorités françaises dans les déplacements médicaux de l’ex-président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Il explique que la France est aussi dépendante de l’Algérie, vu le poids électoral des Algériens en France. Brahimi El Mili signale que tous les candidats aux présidentielles françaises passent obligatoirement par Alger pour avoir la bénédiction des autorités algériennes. Il affirme que contrairement aux Français qui s’intéressent aux binationaux, l’Algérie les exclut de la vie politique avec l’article 51, qui interdit aux deux millions de binationaux l’accès aux fonctions importantes en Algérie.

    À propos des relations algéro-françaises
    Naoufel Brahimi El Mili souligne que « les relations franco-algériennes sont bonnes quand elles sont secrètes, et beaucoup moins bonnes quand elles sont publiques ». Il révèle que les relations entre les deux pays sont prisonnières de connivences secrètes entre les dirigeants et ne reflètent pas les relations officielles assumées par les décideurs des deux rives. Il donne comme exemple l’assassinat de l’opposant algérien Ali Mecili ainsi que le soutien théâtral de la France aux manifestations contre le cinquième mandat.

    Les Français concertés pour l’annulation des présidentielles
    Le politologue lance un pavé dans la marre en soutenant que « le communiqué annonçant l’annulation des élections du 18 avril 2019 a été concerté avec les autorités françaises ». Brahimi El Mili précise : « un haut personnage de la diplomatie internationale algérienne s’est longuement entretenu à ce sujet avec Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères » ; une décision qu’il qualifie d’ingérence française dans les affaires algériennes.

    Le politologue révèle que Yves Bonnet, qui était à la tête de la Direction de la Surveillance du territoire (DST) à une période donnée a découvert le monde du renseignement moyen-oriental grâce aux Algériens. Son limogeage a été retardé grâce aux relations solides de la DST avec la sécurité militaire algérienne. L’admiration de Bonnet pour le savoir-faire des services algériens aurait été nourrie par une certaine générosité. Ainsi, les services secrets des deux pays auraient travaillé en étroite collaboration.

    La France a préparé Lakhdar Brahimi comme successeur à Bouteflika
    Naoufel Brahimi El Mili affirme que la France a soutenu le statu quo en Algérie pour éviter un changement qui aurait mit leurs relations dans une période d’incertitude. Ainsi, depuis Nicolas Sarkozy, tous les présidents ont soutenu Abdelaziz Bouteflika et ses mandats successifs. Il souligne que le choix du président algérien de se soigner dans l’hôpital français du Val-de-Grâce a renforcé la confiance entre l’Algérie et la France.

    D’après le politologue, les services algériens auraient suggéré aux services français Lakhdar Brahimi comme successeur à Bouteflika dans le cas où ce dernier ne survivrait pas à sa maladie.

    Black-out sur l’état de santé de Bouteflika
    Brahimi El Mili explique que les Français ont veillé à ce que les Algériens ne sachent pas le véritable état de santé de leur président et l’ont soutenu pour un quatrième mandat tout en sachant que les élections en Algérie ne présentent aucun suspense. Il affirme que le taux de participation à ces élections n’a pas dépassé les 15 %. Les Français auraient alors développé une ingérence politique sous une couverture humanitaire en Algérie.

    Les services émiratis plus présents et les français plus discrets
    Le politologue affirme que l’influence française sera beaucoup moins visible après l’aire Bouteflika, vu le sentiment anti-français des manifestants algériens. Toutefois, explique-t-il encore, elle sera toujours exercée fortement dans une discrétion totale. Il signale enfin le rôle émirati, qui ne cesse de grandir depuis le règne de Bouteflika et qui est renforcé après sa déchéance

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