Conférence-débat des cadres du MAK à Sahel (Bouzguène) – Hacène Chérifi revient sur l’affaire des poseurs de bombes

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Ahcène Chérifi (70 ans) militants tranquilles!
Ahcène Chérifi (70 ans); Militants tranquilles!

KABYLIE (Tamurt) – Avant d’aller dans le détail concernant cette mémorable rencontre éminemment politique, nous jugeons impératif de signaler d’emblée le haut niveau politique et éducatif ainsi que du sens aigu de l’hospitalité des habitants de Sahel en général et des animateurs de l’association organisatrice de l’événement particulièrement. Dans le bien et dans le mal, l’histoire reste fidèle à elle-même, c’est-à-dire toujours implacable. Concernant cette rencontre en question, elle a commencé par l’observation d’une minute de silence à la mémoire des martyrs de la démocratie et la liberté. L’étape suivante sera traduite par la lecture de deux merveilleux poèmes par Na Sadia, poétesse du village et fort connue dans la maîtrise de la rime. Après cela, le rendez-vous fut édulcoré par une tendre et émouvante chorale magistralement exécutée par les chérubins du Sahel. C’est suite à cela que le président du MAK par intérim, M. Muhend Larvi Tayev, a pris le micro pour développer, rappelons-le, son sujet de prédilection, à savoir l’histoire concernant la civilisation kabyle.

Dans ce créneau de sciences historiques, le conférencier a apporté à la nombreuse assistance, composée de tous les âges et fort attentionnée, une multitude de preuves indiscutable que la civilisation kabyle est non seulement authentique mais est considérée aussi parmi les plus anciennes car elle a servi de modèle et de référence à la civilisation de la Grèce antique. « Au temps où Socrate subissait impitoyablement l’inquisition à cause de ses discours rationnels, la science avait déjà fait un long chemin en Kabylie », a souligné le président du MAK par intérim pour présenter ensuite Platon comme le savant qui a parlé le premier des républiques kabyles. Platon a eu comme disciple Aristote qui, à son tour, eut Alexandre le Grand, fondateur d’Alexandrie, comme disciple. Selon Muhend Larvi Tayev, ce même disciple d’Aristote (Alexandre le Grand) se trouva un jour en Perse remarqua l’innommable. Darius, le roi de Perse, mettait les hommes et les femmes sous le joug pour labourer la terre. Par les sciences humaines, les concepts des mathématiques et de la physique, le roi de Perse apprit d’Alexandre le Grand que les hommes et les femmes ne pouvaient aucunement remplacer les bœufs ou les chevaux dans pareille tâche.

En voulant mettre en évidence le positivisme de la laïcité, le conférencier affirma qu’au cours de l’an 1000, l’Eglise proscrit fermement tout raisonnement rationnel et, par conséquent, l’inquisition atteint son paroxysme. « Et 75 ans plus tard, ajoute-il, l’islam emboite le pas à l’Eglise dans la chasse aux adeptes de la science et de la rationalité ». Pendant cette époque rendue surtout obscure par l’Eglise, selon le président du MAK par intérim, les esprits curieux de la science trouvaient refuge et hospitalité en Kabylie et par le biais de l’université des Hammadites, ils trouvaient des réponses à leurs interrogations. Entre autres preuve du parfait ordre sociologique kabyle où démocratie rimait avec l’harmonie, le conférencier raconta l’anecdote que voici : « Un jour (c’était au 19e siècle), Karl Marx qui se trouvait à Larbaâ Nath Irathen, son attention fut attirée par un mouvement de personnes qui ne lui sembla pas ordinaire. C’était le jour de marché. Au fait, des groupes d’hommes allaient et venaient et discutaient ensuite pendant un temps, puis recommençaient à circuler dans tous les sens. Voulant satisfaire sa curiosité de savant et d’intellectuel, le fondateur du socialisme interrogea quelques hommes sur ce mouvement humain incessant. C’est à cause du prix d’une bête de somme qu’on n’arrive à fixer, lui apprit-on. En effet, un homme d’un aârch se présenta au marché avec l’intention de vendre son baudet et un autre homme d’un autre aârch voulut l’acheter. Seulement, il fallait connaître la valeur exacte en cours de l’animal pour que le vendeur ne se sente pas filouté et l’acheteur de même. Les hommes de leurs tribus respectives présents au marché ce jour-là se sentaient aussi concernés par cette vente-achat. C’était une question d’honneur et de principe. Il fallait donc recueillir l’avis des hommes d’autres tribus sur la valeur exacte du baudet pour que chaque partie ne se sente pas lésée. Ayant compris enfin, Karl Marx eut une preuve supplémentaire du parfait ordre sociologique kabyle ». De cette célèbre anecdote, le président du MAK par intérim passa au système éducatif algérien qu’il condamna avec la plus grande fermeté et qu’il interpréta comme un moyen jugé « excellent » par le pouvoir arabo-islamiste dans le but d’anéantir l’identité et la culture kabyles. « Ce n’est qu’avec l’autonomie de la Kabylie, clama le conférencier, que nos enfants pourront acquérir le savoir et la science ». Le conférencier s’est montré très prolixe hier dans sa brillante intervention.

En ce qui le concerne, M. Hacène Cherifi a développé son discours sur l’affaire des poseurs de bombes. Cette affaire en question a fait couler beaucoup d’encre et fait consommer beaucoup de salive au moment où elle éclata au grand jour. C’était en janvier 1976. Le conférencier qui a fait partie du groupe des poseurs de bombes, aux cotés de Mohamed Haroun notamment, a relaté l’histoire dans son moindre détail et, au passage, a averti l’assistance que son témoignage ne pouvait engager que sa propre personne. Selon donc Hacène Chérif, tout a commencé en 1969 avec la création par un groupe de Berbéristes, jaloux et fiers de leur Kabylie, d’une organisation dénommée « Organisation des Forces Berbères (FOB) ». « Cette organisation ayant pour principe le combat pacifique, explique-t-il, a activé jusqu’à décembre 1972 ». Après sa dissolution, ses membres continuèrent à militer, chacun à sa façon, pour la cause berbère. « En 1974, souligna l’ancien poseur de bombes, trois lycéens, deux jeunes filles et un garçon, qui devaient passer leur examen de baccalauréat cette année là se sont retrouvés à la prison d’El Harrach (Alger) après que leur professeur eut trouvé dans leurs cartables des documents rédigés en Tifinagh. C’est ce professeur en question qui les dénonça aux autorités. Sous l’impulsion du moment, nous avons décidé de nous attaquer à des policiers et des gendarmes pour nous accaparer de leurs armes et tenter ensuite une incursion à l’intérieur de la prison d’El Harrach pour délivrer les trois condamnés. Mais nous ne tardâmes pas à retrouver la raison pour comprendre l’absurdité de notre action ». Un an plus tard, un Kabyle arriva de France et contacta les ex-futurs poseurs de bombes. Et c’est ainsi que le 03 janviers 1976, une bombe cibla le journal El-Moudjahid, à rue de la Liberté (Alger), une autre le tribunal militaire de Constantine et une troisième était destinée au tribunal d’Oran mais n’explosa pas puisque son porteur fut neutralisé avant qu’il n’eut le temps de la placer à l’emplacement voulu. C’est ce même homme qui était l’organisateur de l’opération. « par ailleurs, signale le conférencier, notre homme qui arrivait de France, a destiné cette opération militaire à une autre organisation alors que nous autres, nous pensions agir tout simplement pour la seule cause kabyle ». Hacène Cherif raconta ensuite comment l’ex-Sécurité Militaire arrêta tous les membres de l’équipe après la neutralisation de l’homme qui devait commettre l’attentat au tribunal d’Oran. L’ancien poseur de bombe raconta la torture que lui fit subir un capitaine des services secrets, un Kabyle, pour lui arracher des aveux. « Si aujourd’hui, je ne crains pas la mort, confie Hacène Cherifi, c’est parce que j’ai vu et vécu l’enfer ». L’orateur a affirmé que même sous la torture, il n’a donné aucun renseignement à son tortionnaire. Il n’a pas oublié aussi sa première soirée dans les locaux de l’ex-Sécurité Militaire à Blida ainsi que le repas et la couverture que lui offrit, à ses risques et périls, un militaire arabe d’origine oranaise. Ce militaire le sortit même du placard étroit où le mit quelques temps plus tôt son tortionnaire kabyle pour lui offrir un lit de fortune et cette couverture en question. Dans son long témoignage, Hacène Cherifi a cité tous les noms des personnes concernées par cette aventure. Toutefois, pour des raisons de déontologie journalistique, nous avons, en ce qui nous concerne, décidé de ne pas nommer ces personnes en question. Le récit du conférencier sur ce douloureux événement est si long qu’il faudrait plusieurs pages pour le reprendre en entier. Cependant, nos lecteurs doivent savoir que Hacène Cherifi a animé déjà deux conférences-débat sur ce même sujet dans la wilaya de Vgayet. La première, le 15 avril à Semaoun-Centre, et ce, sur initiative de l’association culturelle Tafukt et la seconde, trois jours plus tard, soit le 18 avril, et ce, sur initiative du Comité de Citée Pépinière de Béjaia. L’assistance a été fort émue par l’histoire racontée par l’un même de ses acteurs.

C’est dans ce climat exceptionnel que Saïd Laïmchi, connu depuis belle lurette pour son engagement pour la reconnaissance du droit du peuple kabyle, intervient. Ce troisième intervenant a commencé par parler du Mouvement National Algérien en mettant en avant la participation active des Kabyles pour démontrer ensuite les paradoxes. « Sur 14000 militants de l’ENA (Etoile Nord-Africaine), 11000 étaient des Kabyles, ce sont là les chiffres reconnus et avancés par Hocine Aït-Ahmed en personne », déclare le conférencier pour ensuite dire que « c’est par faiblesse que les Kabyles ont remis la présidence de l’ENA à Messali L’hadj ». Et toujours d’après Saïd Laïmchi qui défend toujours ses thèses à base de documents archives, même Messali l’hadj a reconnu que c’est sur appel et insistance des Kabyles qu’il a pris la direction de l’organisation. Toutefois, le fondateur du Mouvement National Algérien en décembre 1954 ne sera pas épargné par le conférencier qui
l’accusera d’avoir préféré « éteindre l’ENA que de laisser un Kabyle prendre sa présidence ». S’agissant de la guerre d’indépendance, le conférencier l’impute presque exclusivement aux Kabyles. Comme arguments servant de pilotis pour sa thèse, il cite la déclaration du 1 Novembre 1954 faite en Kabylie (Illoula) et le Congrès de la Soummam organisé également en Kabylie. « Il suffit juste de voir le nombre de martyrs de la guerre de libération nationale pour être convaincu que c’est la Kabylie qui a pris les armes contre la France », signale le conférencier avant de signaler l’antikabylisme et le comportement « étrange » de certains responsables kabyles. Même le comportement de Krim Belkacem suite à l’assassinat d’Abane Ramdane n’a pas échappé au conférencier.

Mettant toujours en avant le vecteur « autonomie », Saïd Laïmchi parlera du coup d’Etat dont a été victime le GPRA en juillet 1962 à Tripoli, le maquis du FFS en 1963 etc. Sur le même registre, l’orateur s’est refusé à reconnaître que l’ANP est héritière de l’ALN. « L’ANP au service du Clan d’Oudjda a bien tiré sur les éléments de l’ALN », signalera Saïd Laïmchi. Ayant constaté avoir dit ce qu’il fallait être dit sur la guerre de libération nationale et la période post-indépendance, le conférencier revient sur le chapitre purement militant concernant la reconnaissance de la culture et l’identité kabyles. Là encore, avec des documents servant de preuves matériels, Saïd Laïmchi fera l’historicité de l’Académie Berbère, le Printemps Kabyle (1980), le Mouvement des Enfants de Chouhada, la création de la Ligue des Droits de l’Homme, les arrestations des militants et leur procès, et tant d’autres faits historiques se situant durant la période des décennies 1970 et 1980.

Il va sans dire que les événements sanglants de 2001 ayant frappé la Kabylie n’ont pas échappé aux conférenciers. En ce qui le concerne, Saïd Laïmchi dira tout haut ce
que bon nombre de gens savent tout bas, à savoir l’inaction des hauts dirigeants aussi bien du FFS que du RCD au moment voulu pour limiter le nombre de victimes. « Dès le début de la violence, signale le conférencier, les hauts responsables de ces deux partis avaient identifié les commanditaires des assassinats mais ont gardé le silence. Pourquoi ? ». Il profitera aussi de cette
occasion pour révéler que les assassinats de jeunes Kabyles en 2001 ont été signés par un clan du pouvoir pour pousser le président Abdelaziz Bouteflika à la porte comme ce fut le cas pour le président Liamine Zeroual avec l’assassinat de Lounès Matoub en juin 1998 à Thala-Bounane. Ensuite, à travers une merveilleuse métaphore, Saïd Laïmchi mettra en avant l’échec du FFS et du RCD : « Nous devons remercier le FFS et le RCD qui nous ont permis de mieux comprendre les choses ». Pour le conférencier, ce n’est pas le programme politique de ces deux formations politiques kabyles qui laisse à désirer car « il est d’une dimension semblable à celui des partis politiques d’Occident ». « L’échec du FFS et du RCD est dû au fait qu’ils soient seulement kabyles », note encore le conférencier avant de citer un exemple sous une forme de plaisanterie : « Si Hocine Aït-Ahmed avait un simple imam d’une mosquée de Aïn-Defla comme rival dans une élection présidentielle, c’est le leader du FFS qui rejoindrait le banc des perdants ». L’assistance se lança à ce moment là dans un fou rire. La volonté du FFS et du RCD de s’accrocher au concept de « l’unité de la nation » est vu par le conférencier comme de l’aventurisme s’apparentant à une lâcheté. Quand vint le moment des débats, plusieurs questions des plus pertinentes ont été adressées aux
conférenciers, sur notamment la nature du régime politique de la Kabylie autonome et la nature de l’alphabet kabyle. Cette deuxième question est posée par une jeune femme. Le débat a été d’un haut niveau politique et intellectuel.

L’association organisatrice de ce rendez-vous mémorable a remis aux trois conférenciers ainsi qu’à nous-même une attestation de mérite pour le travail accompli. Un geste qui va droit au cœur.

9 Commentaires

  1. AZUL,

    A la famille qui avance..

    c’est avec un énorme plaisir que de vous lire…

    Autant, je suis convaincu sur la solution que seule l’autonomie voir l’indépendance sortira la Kabylie de la pensée uniciste, suicidaire et négationniste.

    Autant ,je m’interroge sur ces grands moments de rencontres et me demande ….A-t-on pensé à les immortaliser par des moyens modernes vidéos ,CD -DVD ,cassettes,etc.. pour les porter à la connaissance de la majorité des citoyens mais aussi qu’ils demeurent à jamais pour les générations futures .

    Personnellement,,j’achèterais volontiers de tels produits..

    Il faut y penser si cela ne se fait pas..Garder la mémoire, c’est aussi avoir des images..

    Le sommeil des justes influence le réveil des justes…

  2. Messali L’hadj, son encadarement pour la revolution à été prèsque parfait pour ne pas dire quasi relegieux(trés influencé par l´islam), forts dans ses connaissance en langue francaise, ses discours politique copier chez les mouvements des ouvrier et des paysans européen des années 20.

  3. vous avez falsifié l’histoire et maintenent les noms alors votre chef s’appel Muhend Larbi Tayeb et non Muhend Larvi Tayev avec la tettre V . c honteu

  4. (« Dès le début de la violence, signale le conférencier, les hauts responsables de ces deux partis avaient identifié les commanditaires des assassinats mais ont gardé le silence. Pourquoi ? ». Il profitera aussi de cette occasion pour révéler que les assassinats de jeunes Kabyles en 2001 ont été signés par un clan du pouvoir pour pousser le président Abdelaziz Bouteflika à la porte comme ce fut le cas pour le président Liamine Zeroual avec l’assassinat de Lounès Matoub en juin 1998 à Thala-Bounane.)

    Je pense que nous devrions evites de remuer les moments historique qui ne peux que embrouilles la vue et faire perdre le temps precieux pour voir le danger(havssat assaxyuggadh da ggsaghur! yalla unaghur).s il n y a pas vremment une vrais avencer dans la lute des kabyle,tous kabyle digne le savent a partir du resultat des partit ffs et rcd qui sont au devant de la scene kabyle, l interets des kabyle n est pas de savoir s il ya des clons qui se battent au niveau de letat algerienne et par contre est d etre conscient de son ennemis en block je dirait que l harbre modit est ramener par des kabyle par ignorence et facination pour l implanter juste au cote des fondation de la kabylie, ses racine se prolange en afaiblaissant les fondation avec ses branches et ses feuille il ne saisse de grandir!.
    Aujoudhuit on doient consontrer nos energie et eveille la conscience de tous les kabyle et leus rendre la conffience en eux meme ,les metre sur la voix de repparer la maison et porter leur aides inconditionnelle lpour le but ultime d abattre cet arbre de malheur(froco arabeislamique).
    ce qui est plus important est de rendre au kabyle leur fierte , comme le fait l arvi Ttyav,je luis dit bravo et merci!il ya aussi un vrais probleme qui gongraine les mases , la peur irrationnelle qui est encourager par l etat coloniale froco arrabe a traver leur reseau zaouiyat et islamist pour cerner les reflexion resonnable ,on doit s attaquer a ces tabous.la peur paralise! avec le ffs et le rcd(NAPUDH AR GRI-VARDEN,LVUR URDDIVAN!)

  5. un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre. Winston cuirchil
    un peuple sans culture est un peuple mort. mouloud mamerri
    alors les kabyles soyant uni autour de notre identité et notre histoire commune!

  6. Il y a plus de 21ans, de son retour du 2e séminaire du mouvement culturel berbère organisé à Tizi-Ouzou en été 89, cette association culturelle villageoise, avant-gardiste je dirais, invita Mohand U Harun qui, a passé -rappelons le- 11 ans de prison pour cette affaire de bombes, avait exposé, à cette même place, ses travaux sur la grammaire berbère.

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